Publié le 12 Mai 2024

Dans le dernier article sur le salut politique possible, il était fondamental de comprendre que la situation socio-économique que nous vivons (en France et en Occident) est instable : de grands équilibres sont rompus (écologique, militaire, économique, sociologique, etc.) et il est nécessaire de trouver une nouvelle position "globale" pour les sociétés les plus avancées dans l’ère industrielle (dont la France, bien sur) afin de maintenir la structure socio-économique actuelle (mêmes infrastructures, mêmes système politique, etc ....) .

Or pour trouver un nouvel équilibre, à l’échelle de la France, il est nécessaire d’alléger le niveau des contraintes sur sa société afin de libérer des ressources, ceci devant permettre de faire tenir encore (un peu...) ce qu’il est possible de faire tenir (éducation, santé, etc....).

Or quelle est actuellement la principale contrainte sur nos sociétés ? (Avant même la baisse des ressources, cf. la modélisation du rapport Meadows en 1972 J’ai fait une évaluation des données du modèle World3 qui prévoit l’effondrement global. Voici ce que j’ai trouvé. | by Jancovici | Medium .

Roulement de tambours : Il s’agit de la baisse de population.
 
En effet, contrairement à la thèse des années 50/60, nous n’allons pas connaitre une explosion démographique sans fin (cf le film : "sept sœurs") mais au contraire une contraction rapide de la population. L'humanité à l'aube du déclin démographique - rts.ch - Mond L'humanité à l'aube du déclin démographique - rts.ch - Monde  et  La baisse de la fécondité humaine dans le monde pourrait être plus rapide que prévu.
Or si la croissance démographique s’accompagne nécessairement d’une croissance économique (s’il y a plus de consommateur : il faut produire plus et le surplus économico-social (le « Luxe ») est plus important). La décroissance démographique s’accompagne également d’une décroissance économique (pour les raisons exactement symétriques de la croissance démographico-économique) avec un « Luxe »(le surplus) qui s’effondre.
 
Une modification radicale des sociétés occidentales (dont fait partie la société française) est donc devant nous suite à cette réduction démographique avant même le "simple" problème des ressources "primaires".

La première adaptation proposée à cette contrainte, la plus facile, celle qui ne posait problème à personne, était de compenser la décroissance démographique prévisible par de la croissance technologique. Mais deux problèmes sont apparus :

1- Les ressources énergétiques sont en train de baisser pour des raisons physiques. Il y a eu une tentative pour remplacer les énergies fossiles par d’autres énergies plus "durables" mais il est manifeste pour toute personne qui sait poser une règle de trois que c’est un échec. Les énergies "durables" sont à mettre en place (de manière rationnelle …) mais elles sont juste un « amortisseur de la baisse » et non un substitut aux énergies fossiles.
 2- La complexité technologique pour remplacer un humain (par exemple le rêve de la robotique au japon) est au delà des capacités actuelles de nos sociétés. Le remplacement d'humains par des machines est certes possibles à petite échelle (IA notamment) mais sera trop consommateur de ressources pour que cela soit une solution à l’échelle d'une société.

Le Japon, qui est en avance de cycle sur le reste de la planète sur cet aspect, a expérimenté cette solution et passe maintenant à une autre stratégie devant le cul de sac du "tout robot".

Il restait donc trois facteurs prépondérants (d’autres facteurs existent mais sont beaucoup moins "essentiels") pour répondre à la crise de la contrainte démographique. Ces trois facteurs seront impactés pour établir le nouvel équilibre de la société (aucun de ces facteurs ne continuera exactement au niveau d' "avant") mais l’un de ces facteurs devra être complètement "sacrifié" pour permettre au « système » français de perdurer globalement … encore …. un peu.

Sur quels leviers pouvons nous donc agir ?

ils sont trois :

-  L’économie
-  L’immigration
-  Le "féminisme"

 Le premier levier possible est le sacrifice de l’économie. Basiquement cela consiste à réduire le train de vie de toute la population française afin de pouvoir concentrer les ressources dégagées sur ce qui est indispensable et utile à à la société (une "retraite organisée"). Cela n’est pas une réduction mathématique pour tous : Un campagnard habitué à une vie rustique et locale ne verra quasiment pas de changement dans son mode de vie. Par contre, le citadin habitué à prendre l’avion et à acheter des plats tout préparés en travaillant dans un bureau sur une « abstraction d’abstraction » (« Bullshit job » !) connaîtra sans doute un changement quasi complet de son mode de vie.

La majorité de la population sera entre ces deux extrêmes.

Ce choix n’est toutefois aujourd’hui pas possible à court/moyen terme. Cela ne veut pas dire que le niveau de vie ne baisse pas ( La baisse a commencé dans les années "1970" avec une accélération depuis 5-8 ans) mais des forces politiques puissantes vont s’opposer ou au moins fortement limiter ce mouvement à court terme :

 La première force, c’est le fait que l’oligarchie française actuelle (étatique ou non) repose sur la force économique. Elle voudra donc limiter au maximum la baisse de l’économie liée à la raréfaction des ressources (par exemple en tentant d’envahir un pays riche en ressources naturelles, en levant des impôts « exceptionnels », en "QRcodisant" la société) pour faire tenir « encore un peu » la machine économique nationale sous sa forme actuelle.
 La seconde force, c’est la religion du progrès qui est encore bien présente dans notre société.
Personne (enfin l’écrasante majorité….) ne peut concevoir que sa propre situation va se dégrader de manière irrémédiable pour soi et ses proches (descendants, collatéraux, cercle amical, etc ….). C’est l’inverse de ce qui s’est passé depuis 3 ou 4 siècles.
Il n’y a qu’à voir les appels démagogiques des hommes politiques de droite ou de gauche : C’est systématiquement l’appel à plus de technologie (le « progrès », notamment numérique) et à relancer la machine économique (la « croissance »).
Et la masse populaire répond toujours positivement à ces appels à du "toujours plus" (notamment lors des élections), preuve qu’il n’est pas encore possible d’avoir un programme adulte d’adaptation aux ressources disponibles (toutefois avec la perte de l’Afrique, il est possible que la France n’ayant plus accès à des ressources extérieures découvrent plus rapidement l’austérité que d’autres pays occidentaux).

L'économie et le niveau de vie associé ne sont donc pas, a priori, un levier possible pour trouver un nouvel équilibre à court terme.

Le deuxième levier possible, c’est la continuation de l'immigration. En effet, pour compenser la baisse d'une population, si vous voulez maintenir le même niveau d’activité économique sur un territoire géographique donné, il est nécessaire d’importer une population d'un autre territoire. C’est le choix qui a été fait en France depuis 1962 (à l'époque c'était pour des raisons sensiblement différentes mais depuis les années 80- et l'explosion du chômage, c'est bien la baisse de population qui est prise en compte par nos "élites" françaises et européennes).
 
En résumé : pour compenser la baisse de natalité, il a été décidé d’ouvrir les frontières afin d’accueillir des populations "différentes", selon le calcul simpliste qu'un humain est remplaçable par un autre humain sans tenir compte des spécificités de chacun (une vision très "machiniste" de l'homme, encore un avatar de la "religion du progrès").

L’avantage était double : d’un côté vous aviez les « mains nécessaires » pour faire tourner la machine économique, de l’autre le niveau de vie des arrivants étant faible, il était moins demandeur d’une part de la richesse nationale que les "autochtones". Le surplus pour les propriétaires des moyens de production était donc accru.

Bien sûr, ce double avantage était temporaire car :

-  Les descendants des nouveaux arrivants, comme les autres « résidents » du pays, demandent la même part de richesse et les mêmes tâches professionnelles « faciles ».

-  L’assimilation ayant, pour diverses raisons (mépris du culturel, mépris de l'éducation, mépris du religieux, etc ....), été mal menée : La reconnaissance de l' "état-nation" comme autorité suprême n'est plus d'actualité pour une part de plus en plus significative de ces populations "importés". Dans ce cas, comment seront arbitrés les choix de société si l'arbitre n'est pas le même suivant la population concernée au sein de la nation ? G Collomb a bien résumé la situation : « Nous serons bientôt face à face ». Ce n'est pas une situation d'équilibre pour une société .....

Point particulier à noter : "rapidement", il n'y aura plus assez de population à l'échelle de la planète au vu de la baisse démographique globale (même en Afrique....). Ce qui par nature va limiter les flux et établir une concurrence entre les états sur la "ressource humaine". Ce n'est pas pour tout de suite, mais je suis persuadé que nos élites franco-européennes ont cru anticiper la prochaine course à la population des Etats en essayant de s'assurer (dans les années 80....) des flux avant les autres mais sans prendre en compte les difficultés dans leur aveuglement épiméthéen (cf la fameuse déclaration de Merkel "Nous y arriverons", cela transpire la réflexion….).

Bien sur, il est évident que pour des élites à courte vue (comme celle de la France....), l'immigration était la solution à privilégier par rapport à toutes autres solutions. Sans doute pas dans un but de destruction : il est difficile de croire que le but d'une élite soit de détruire sa propre civilisation. Ce ne peut pas être le but d'une élite qui, au contraire, profite, de manière souvent abusive, de cette civilisation.
L'explication consiste plutôt dans ce la décadence des élites, incapables de voir les conséquences à long terme et leur responsabilité vis à vis de "leur" population. Ce laxisme aura permis de faire tenir le système pendant 40/50 ans et de maintenir leur position ..... à court terme..... sans l'effort d'une confrontation au réel.

...... Mais, comme signalé (notamment par G. Collomb cf supra), les avantages de l’immigration vont en s’amenuisant, tandis que ses inconvénients augmentent.

Le levier de l’immigration pour compenser la baisse de population n’est donc sans doute plus possible. La pression sociologique va rapidement conduire soit à une fermeture des frontières, soit à un éclatement de la société (Peu probable en France néanmoins : le pays a des ressources pour mettre au pas des populations "turbulentes". Mais dans un tel cas, les élites changent....d'où le refus des élites actuelles de passer à l'action mais, "à un moment", la pression sera trop grande....). Pour des raisons sociologiques, les frontières vont se fermer (sans doute à court terme). Cette adaptation n’est donc pas non plus possible, à court terme, pour faire tenir le système.

Et il reste le dernier levier possible : Le sacrifice du féminisme.

En effet, il y a une forte corrélation INVERSE entre le statut des femmes dans une société donnée et le nombre d'enfants par femme. Corrélation n'est pas causalité mais il est manifeste que si le statut des femmes n'est pas corrélé au nombre d'enfants qu'elles produisent, elles n'ont aucune incitation (dans le sens socio-économique) à faire l'effort d'avoir de nombreux enfants (d'autres facteurs "corrélés" peuvent également jouer : la vie citadine, la durée des études, etc … mais la cause principale me semble être le statut de la Femme).
 
Je parle d'effort car pour une femme la grossesse est une épreuve dans sa chair (contrairement à l'homme..) sans parler ensuite de l'investissement économique pour le couple (aujourd'hui quasiment impossible au vu de la baisse du niveau de vie, quand une éducation correcte est cherchée…). 

Attention : J'utilise le terme générique de féminisme pour désigner toute idéologie qui promeut la reconnaissance similaire des hommes et des femmes et qui donc promeut un statut basé sur les mêmes réalisations.

Pour éviter tout malentendu, je suis tout à fait favorable à l'égalité JURIDIQUE entre un homme et une femme mais il me semble qu'une société qui demande à ce qu'une femme effectue les mêmes tâches qu'un homme pour être valorisée, n'est pas une société fonctionnelle (Les sociétés qui ont militarisés les femmes, par exemple, l'ont vite regrettées). 

Après ces éclaircissements, Il est manifeste que dans un monde où une baisse de population significative apparaît, où il sera impossible d'organiser un reflux du niveau de vie "adapté" ou une immigration "constructive", l'adaptation efficace ne pourra d'abord venir que d'une remontée du nombre de naissance sur le sol national. Or ceci ne sera possible que si le statut des femmes tient compte à nouveau du nombre d'enfants (et de l'éducation qui leur est donné….).

Ce changement de statut ne sera sans doute pas un changement brusque mais plutôt un glissement lent (sur quelques décennies, sans doute 20 ans, le temps d'une génération environ) vers une société "natalo-centrée".

Vu que le manque de ressources (visible à travers la dette publique) interdit maintenant le clientélisme et une politique nataliste "récompensante", j'imagine que cela prendra la forme de contraintes pour celles qui n'ont pas eu le "bon" nombre d'enfants (difficulté pour avorter ou avoir accès aux contraceptifs, moindre soins médicaux, dégrèvement des droits à la retraite pour le couple, etc.....).

Je soupçonne fortement les féministes actuelles qui hurlent que les "femmes ne sont pas des ventres pour enfanter" d'avoir compris cela. Malheureusement, pour des raisons à la fois d'incompétence et de conflit d'intérêts (cf voir article précédent), elles ne cherchent pas réellement à gagner ni même à comprendre ce combat.

Il est d'ailleurs intéressant de noter que si les femmes sortent du salariat et "retournent" au foyer, il y aura sans doute à la fois un regain de natalité mais aussi également une baisse économique significative puisqu'une partie de l'activité du "foyer" aujourd'hui externalisée (à cause des femmes au "salariat") sera à nouveau effectuée sans flux économiques "investissables" ou "taxables". Il est donc normal que le Grand Capital, l'Etat et le Féminisme Politique soient des alliés pour éviter une telle évolution.

Cette évolution peut néanmoins prendre différentes formes et dès aujourd'hui des stratégies sont possible à une échelle "locale" pour éviter une évolution trop draconienne dans ce changement de statut. Maintenir une place centrale des femmes dans la religion est une des pistes qu'il est possible d'explorer (voire même passer un pacte dans l'occident (un nouveau nouveau "testament" étymologiquement) pour protéger celles qui veulent maintenir une certaine autonomie (qui engendre toutefois une responsabilité supplémentaire....), autonomie non admise dans la religion du djinn-qui-a-réussi)

Je souhaite voir ces stratégies d' "amortissement" mises en place car je n'ai pas envie que les femmes de mon entourage soit considérées, dans un avenir proche, comme ne valant que la moitié d'un homme (au moment de l'héritage notamment...) ou comme d'éternelles mineures.

L'évolution que l'on peut attendre est donc, suivant ces hypothèses :

- Un maintien approximatif du niveau de vie pour la population dans son exemple (une pente descendante mais sans chute brutale)

- Une fermeture des frontières nationales et un retour à une assimilation forte des populations d'immigration (la grande question est : Quelle sera la culture de référence en France d'ici 10-20 ans ?)

- Un changement des marqueurs du statut social de la femme et son retour dans l' "économie domestique"

La difficulté de l'évolution qui est devant nous est de reconnaître son évolution inéluctable (actuellement beaucoup de personnes sont dans le stade du déni en ignorant les contraintes écolo-économique) mais également de voir la subtilité de défendre une égalité juridique homme/femme tout en prônant/anticipant un retour des femmes dans l'économie domestique.
Ce combat est important car il est d'essence culturelle :

Une femme émancipée (même si elle a une place "a priori" dans l'économie domestique) correspond à la culture européenne atavique (les deux sexes sont différents mais égaux). Ceci est visible, par exemple, dans le statut de la femme dans l'antique Irlande, "matrilinéarité" picte et bretonne, etc...

Une femme non émancipée ( qui sera obligatoirement dans l'économie domestique) correspond à la culture orientale (les deux sexes sont différents et inégaux). Ceci est visible dans l'institution de la femme comme butin de guerre (un mode de recrutement classique de jeunes "soldats" qui suppose l'acceptation dans la loi et dans la culture de la polygamie et du concubinage, non reconnu à l'ouest du Bosphore....).

C'est cela qui est en jeu à travers la réponse à cette première contrainte : la définition d'une des règles de base dans l'organisation d'une société.

Ce combat est subtil mais il est essentiel qu'il soit compris par les hommes et ..... les femmes pour éviter que certaines valeurs intéressantes de nos sociétés soit "oubliées" durant la chute vertigineuse est devant nous. Et que cela donne l'occasion à certains, "mieux préparés", de nous inféoder de gré ou de force à des idéaux inégalitaires, notamment lorsqu'ils sont soumis à des "puissances" d'une nature autre que matérielle...
L'âne de Buridan : L'indécision est un péril mortel ..

L'âne de Buridan : L'indécision est un péril mortel ..

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Publié le 9 Mai 2024

Suite aux évolutions actuelle et prophétisée (cf articles de ce blog) de la société, une série d'articles d'analyses Politiques va prendre place sur ce blog (en plus des articles sur les religions libres et la pratique).

Le P majuscule est de rigueur : Le but n'étant pas d'imposer des choix mais plutôt d’éclairer les choix : Certaines choses ne sont déjà plus possible malgré les beaux discours, et certaines choses sont encore possibles mais nécessitent un changement d'état d'esprit.... (Tiens quel est le nom de l'art de changer de conscience en accord avec la volonté ? :-) ).

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Une énigme prend place actuellement en France : Depuis des décennies, une écrasante majorité n’apprécie pas le régime politique en place et surtout ses décisions pour la Nation (abandon de la souveraineté, abandon de la santé publique, abandon de ses industries, etc.) mais, malgré cela, la France n’arrive pas à réorienter sa Politique (et ses politiques) pour prendre un cap plus conforme à ce qui est souhaité par la majorité de la population (le score absolu du président français et surtout le taux d'abstention lors de l'élection en 2022 peuvent servir de preuve aux rares septiques).

Définissons d’abord le problème qui accable la France (la « cause des causes » comme dirait Etienne Chouard et Aristote).

La France (comme beaucoup d’autres pays) est confrontée à un problème écologique grave. Elle n’a plus ni les ressources, ni l’accès aux ressources (directement via des colonies/états clients ou indirectement via un commerce lucratif avec un excédent en valeur dans l’hexagone) afin de pouvoir maintenir le niveau de vie de sa population (le niveau de vie est, ici, à prendre dans un sens très large : santé, éducation, accès à la culture, à la justice, à la vie politique, etc.).

Cette simple affirmation était sujet à de vastes débats, il y a encore peu : l’essentiel du questionnement étant la nature originelle du problème : est-il avant tout écologique (pénurie) ou politique (accaparement) ?

Au vu des problèmes actuels de pénurie d’énergie, d’agriculture et de métaux rares (J.M. Jancovici, G. Pitron, M. Auzanneau, les époux Bourguignons et bien d’autres), il apparaît évident que ce n’est pas un changement d’exécutif ou de législatif qui permettra « magiquement » de compenser l’épuisement des sols ou de découvrir néodyme (un métal rare) et pétrole dans le Poitou.

Le problème est donc d’abord « écologique » avant d’être « politique » et les politiques et les stratégies de la Nation devraient tenir compte, avant tout, de cette contrainte (le plafond des ressources selon F. Braudel, il s’agit donc d’un problème classique pour qui étudie l’histoire).

Pourtant malgré des niveaux records d’information et d’études disponibles (internet !!!), aucun mouvement populaire n’arrive à se lever pour changer le cap « politique » actuel. La population continue à être torturée et spoliée d’année en année, de décennies en décennies et …. rien ne bouge.

Qu’est-ce qui peut expliquer une telle paralysie politique, alors que nous avons maintenant des bruits de bottes (gilets jaunes, bellicisme étatique sur l’Ukraine, …) et de dépliement d’ausweis très persistants (Covid, surveillance des JO, …) en France ?

Un plan !

Attention pas un plan « complotiste exubérant » de plusieurs millénaires avec reptiliens, aliens et quelques dieux plus ou moins sataniques : plutôt un simple plan de politiciens français soumis à des oligarques tout aussi français.

En effet depuis quelques décennies (1970 et le peak oil US), les « élites » françaises (comprendre les « riches » d’après JK Galbraith) ont compris que l’épuisement des ressources de la planète n’était pas un mythe.

Or il n’y a pas eu d’« homme providentiel » pour préparer le pays en globalité à cette fin des jours d’abondance (la consolation, c’est qu’il n’y en a pas eu, non plus, dans les autres pays européen de l’ouest. A l’est, la question est posée…).

Chaque partie de l’élite (comprendre chaque oligarque) a donc décidé de sauver son pré carré et personne n’a pris en compte l’intérêt global du pays et de sa population.

Or quand les ressources s’épuisent, pour accroître (ou simplement conserver) votre patrimoine, il ne reste plus qu’une solution : Augmenter la part de ressource que vous prélevez plus rapidement que la baisse liée à l’épuisement.

Le problème c’est que cela veut également dire que la part de quelqu’un diminue non seulement avec la pénurie mais aussi avec l'accaparement croissant. Toutefois, c'est un effet supplémentaire et non la racine du problème.

En France, pour schématiser, les oligarques ont donc décidé, chacun de leur côté sans grande concertation préalable, d’augmenter leur part au détriment de la population générale. Ceci afin de compenser, pour eux, la baisse de l’accès à des ressources.

Mais dans une démocratie (et même dans les autres régimes mais c’est plus long…et plus sanglant - cf Michel Debré et sa présentation sur la constitution de 1958), cela génère un petit problème. La majorité d'une population est capable, dans des temps difficiles, de comprendre le problème puis de choisir (et d’imposer …) un dirigeant qui pourra avoir une politique sinon satisfaisante mais au moins acceptable pour le plus grand nombre. Avec un soutien populaire puissant, ce dirigeant est même capable de s’opposer aux oligarques (César, par exemple, en son temps a joué exactement ce rôle mais c’est son fils adoptif, Auguste, qui a pu profiter de son « travail »).

Pour les oligarques (et leurs marionnettes politiciennes, de « gauche » ou de « droite ») le principal risque systémique est donc d’avoir un personnage qui en s’appuyant sur les nombreux mécontents de leur « racket » pourraient réunir une majorité de la population, la convertir en mouvement politique et renverser les politiciens corrompus ayant passés un « pacte » avec eux : Ceci afin de mettre en place une inversion de la concentration/accaparement des ressources mises en œuvre par cet « état profond » à la française et surtout, surtout, de mettre en place une politique en adéquation avec les ressources réellement disponibles (et là c’est avec la population que l’arbitrage, in fine, se fera ….).

Quelles sont les caractéristiques de la majorité capable de s’opposer aux oligarques ?

Si on considère que les oligarques sont les gagnants dans le monde actuel, nous avons des personnes qui sont (si on met de côté leur richesse comme facteur commun) :

· Contre les frontières

· Contre la limitation à l’exploitation des ressources

Les deux sont liés. A partir du moment où vous exploitez les ressources en détruisant l’environnement notamment à un degré dangereux pour la santé (cf voir les dégâts de l’exploitation des sables bitumineux), il devient important que vous puissiez aller vivre « ailleurs » sans trop de problème.

Ce point est également visible avec le fameux NIMBY (Not In My Back Yard – Pas dans mon jardin). Beaucoup de gens sont tout à fait d’accord à ce que l’extraction minière, pétrolifère, etc…. soient redéveloppées mais pas là où ils vivent et pas avec eux comme ouvriers …..

NIMBY, c’est en fait la version « pauvre sédentaire » du « riche nomade ».

Une attitude tout à fait rationnelle dans les deux cas : Qui a envie de vivre dans un environnement dégradé pour sa santé ? Mais « en même temps » qui a envie de renoncer à la technologie moderne ?

Ces deux pulsions contradictoires amènent un « déni » (dans le sens de Kubler Ross, cf. les étapes du deuil), vu que l’aveuglement volontaire est à la fois plus facile et plus « confortable » à court terme, à court terme seulement….

C’est une vision assez schématique mais elle permet d’identifier sur quelle "grande stratégie politique" un opposant à nos oligarques devra s’appuyer pour renverser les politiques actuels.

La personne qui renversera l’oligarchie institutionnel française doit, pour créer sa majorité, rassembler des personnes qui s’opposent à au moins un de ces deux points et donc nous avons « par reflet » :

· Les souverainistes (ce qui inclut les gens qui ont un intérêt économique à ce que les frontières soient fermées : ouvriers plus ou moins spécialisés, la majorité des agriculteurs, etc. : de manière générale, toute personne dont le travail peut être mis en concurrence avec des pays moins « sociaux » (droit du travail), moins « écologique » (destruction acceptée de l’environnement) mais aussi ceux dotés de grandes ressources naturelles)

· Les écologistes (ce qui inclut les personnes qui ont intérêts à ce que leur lieu de vie soit sain : soit a priori la totalité de la population, mais des différence apparaissent suivant divers facteurs : Capacité matérielle à changer de mode de vie, compréhension des contraintes environnementale et surtout le principal, le refus de changer si les "élites" ne changent pas en premier)

D’abord une bonne nouvelle : cette personne qui renversera le système apparaîtra. Elle apparaît toujours quand une société est en crise. Mais plus elle apparaît tôt et plus elle a de liberté pour réorganiser la société en gardant un maximum de niveau de vie de la population. Un autre point est que plus cette personne apparaît tôt et plus elle est « saine » mentalement. F.D. Roosevelt et C. De Gaulle (qui ne s’appréciaient guère) sont ainsi de très bon exemple de César « sain ». Malheureusement, historiquement, certains qui ont pris cette position de « César » étaient beaucoup moins éthiques et équilibrés (Staline, Hitler, etc. ).

Nos oligarques institutionnels (et leurs pantins politiciens) ont analysé ce danger au fil de la dégradation socio-politique post 70 : Pour eux, l’homme du renversement est le problème avant même tout débat sur les évolutions qu’il proposera. Pour y parer, il suffit donc d’empêcher la réunion des deux courants en opposition frontale avec leur politique égoïste de classe et, de manière plus générale, d’empêcher que ces deux courants soient vus favorablement par une grande partie de la population.

Une fois que ce clivage entre nationalistes et écologistes est fait, il reste un jeu de « petite politique » sur la majorité de la population, ignorante du « grand jeu » (la fameuse segmentation électorale par classe d’âge, catégories socio culturelles, etc ….) afin d’essayer de placer son candidat (par rapport aux autres oligarques).

Les élections sont donc aujourd’hui un choix entre les candidats des oligarques. Ceci explique que la situation ne bouge pas et qu’elle est toujours orienté vers l’avantage d’un ou l’autre des oligarques qui tiennent les fils de leurs marionnettes politiciennes. La règle implicite (pour maintenir le statu quo) est que si en relatif un oligarque peut perdre ; dans l’absolu, c’est toujours la population qui doit voir sa part de ressource baissée par rapport aux oligarques.

Dans ce jeu avec ces règles établies, la majorité de la population ne peut pas voir son sort s’améliorer, c’est systémique.

Bien sûr, il y a d'autres dispositifs prévus pour maintenir le statu quo (distractions des masses, répression policière, sabotage de l'institution judiciaire et politique, usage d'un lumpenprolétariat plus ou moins importé, clientélisme avec l’étranger, etc....) mais la racine et l’absence de réponse constructive tient à cette segmentation des idées qui empêche l’expression d’une véritable opposition aux oligarques et à leur politique de prédation.

Ce long développement était nécessaire pour faire comprendre que certains leaders qui tirent systématiquement contre leur camp font partie d’un plan et doivent être mis en minorité par la « base ». Quelle est l'écologisme d'un député écologique actuel pour qui se souvient de René Dumont en 1974 ? Quel est le programme économique concret de ceux qui prétendent représenter le nationalisme français ? De Gaulle avait fait le choix du nucléaire à la fois comme réponse civile et militaire pour faire face aux défis de son époque. C’est discutable mais au moins c’était une stratégie concrète, pas une simple posture démagogique se basant sur des sentiments d'identification plus ou moins éthiques.

 
Ceci éclaire également le rôle des écolos intégristes qui balances soupes et peintures sur des tableaux considérés comme des trésors artistiques. Qui décrédibilise ainsi le mouvement écologique : A part quelques marginaux, qui aurait envie d'avoir de tels profils dans des postes étatiques ? Cette stratégie est plutôt destinée à l'électorat de "droite" (plutôt "conservatrice" et donc valorisant la conservation du "beau, du bien et du vrai" du passé).
 
C'est également le rôle des "facistes-nazi-racistes" opportunément sorties à chaque mise en place d'une manifestion pour défendre un cadre national d'action. Qui décrédibilise ainsi le mouvement national : A part quelques marginaux, qui aurait envie d'avoir de tels profils dans des postes étatiques ? Cette stratégie est plutôt destinée à l'électorat de "gauche" (très "conservatrice" dans son "maintien mémoriel" des sinistres césars de l'Allemagne et de l'Italie du milieu du 20eme siècle).

Comprendre ce piège des « élites » qui achètent ou mettent en place des agents du chaos pour décrédibiliser et empêcher l’union populaire salvatrice est nécessaire afin de mettre en place une majorité dans la population qui comprendra les enjeux et sera capable, non pas de rêver ou de se lamenter, mais d’améliorer sa situation à partir de la situation concrète.

En vérité, si le pays veut se libérer du joug de l’oligarchie économico-financière il doit comprendre le piège et choisir un « leader du renversement » qui ira disloquer ces néo-bourguignons, ces « partis de l'étranger » (qu’ils soient de l’Ouest, de l’Est, du Sud ou Européen).

Ce leader devra s'appuyer sur un parti populaire capable de faire plier des oligarques (autant dire qu'il faut à la fois une forte capacité à mobiliser la population et à déjouer les pièges politiques car il y aura de la résistance, beaucoup de résistance : tous les coups seront permis…)

 Pour avoir cette assise populaire, ce leader ne doit pas rentrer dans le clivage droite/gauche, seule grille d’analyse de nos paléo-médias, grille qui n'a plus de raison d'être. Les postures de l’époque où le pays avait un excédent à investir dans l’outil de production (Droite) ou dans la population (Gauche) sont devenues inutiles : Il n’y a plus d’excédent (les différents déficits, financier et courant du pays sur plusieurs années, le démontrent)

 

Ce leader devra s'appuyer sur le clivage « écologie-nationale » contre « pillage hors-sol » (le mot écologie doit être avant le mot national. la Nation est, ici, un outil, le problème actuel à résoudre est d’abord dans l’écologie : La "France" ne nourrit personne, c’est le sol français qui nourrit). 
 
Ce « pillage hors-sol » à terme et par nature, ne peut qu'échouer (il n’y aura pas de pays ou de planète de rechange…). Mais plus vite, ce renversement est fait et plus il y aura de ressources disponibles pour organiser nos vies APRES le renversement inéluctable.

 J’espère simplement que nous aurons en France, comme prochain leader un homme inspiré par Roosevelt (qui traita notamment le problème écologique du Dust Bowl, bizarrement ce fait est généralement "oublié" dans la culture moderne où, par contre, son « New Deal » est "glorifié" … ) plutôt qu’un avatar maléfique, malheureusement commun dans l’Histoire.

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Publié le 21 Décembre 2023

Le retour de la religion

Traduction d'un article de John Michael Greer avec son aimable autorisation (original ici  https://www.ecosophia.net/the-return-of-religion/ )

 

L'auteur d'origine somalienne et ancienne Nouvelle Athée, Ayaan Hirsi Ali, a provoqué une certaine agitation dans plusieurs colombiers l'autre jour lorsqu'elle a publié un essai annonçant qu'elle avait abandonné l'athéisme et qu'elle s'était convertie au christianisme.  Les écrivains chrétiens que j'ai lus et qui ont discuté de son essai s'en sont bien sûr réjouis, tandis que la plupart des autres dont j'ai pu lire les commentaires ont été surpris.  La communauté athée n'était sans doute pas contente, mais j'ai noté un silence de mort de sa part.

Ce n'est pas surprenant. Ali était la tête d'affiche des Nouveaux Athées, une femme de couleur qui a abandonné l'un des courants les plus fondamentalistes de l'Islam pour embrasser le libéralisme rationaliste occidental, et le fait qu'elle tourne le dos à ses anciens amis de la scène athée pour embrasser à nouveau la religion a dû constituer une surprise affreuse et une profonde déception.

Ces réactions sont inévitables, car l'idéologie de l'athéisme moderne est inséparable de la foi dans le progrès. C'est également le cas de la plupart des systèmes de croyance acceptables de l'Occident industriel moderne. La croyance dans le progrès - la notion basée sur la foi que toute l'humanité est sur un voyage à sens unique des cavernes aux étoiles, que les nouvelles idées sont supérieures juste parce qu'elles sont nouvelles et que les anciennes idées sont toujours inadéquates juste parce qu'elles sont anciennes - est la mythologie établie de notre temps, jouant exactement le même rôle dans les nations industrielles occidentales que la croyance dans les actions des dieux et des héros a joué dans ces mêmes nations un millier d'années plus tôt. Lisez n'importe lequel des écrits des nouveaux athées et vous obtiendrez une bonne portion du mythe du progrès : la croyance en des dieux appartient à un passé révolu, selon la logique, et l'athéisme est la vague de l'avenir glorieux dans lequel nous sommes censés piétiner les étoiles sous nos bottes de sept parsecs.

Sortez de cette mythologie douteuse et les choses semblent différentes. C'est ce qu'a fait Oswald Spengler il y a plus d'un siècle. Spengler, pour ceux qui ne le connaissent pas, était un historien allemand qui a entrepris de donner un sens à l'essor et à la chute des civilisations par le biais de la méthode comparative, en alignant les civilisations du passé les unes à côté des autres et en observant les schémas communs qui en ressortaient. La morphologie comparative - c'est ainsi que l'on appelle ce que faisait Spengler - était une spécialité allemande au cours du siècle et demi qui a précédé l'époque de Spengler.  Johann Wolfgang von Goethe, cet extraordinaire polymathe, a jeté les bases de la théorie de l'évolution de Darwin en l'appliquant aux structures physiques des plantes et des animaux, montrant (par exemple) que chaque partie d'une plante en surface est une adaptation d'un motif de feuille de base, et des dizaines de savants allemands ont appliqué un raisonnement similaire aux énigmes de la biologie et de la géologie, avec d'excellents résultats.

Bien sûr, la biologie et la géologie n'ont généralement pas d'implications importantes dans le monde de la politique et de la culture contemporaines. C'est l'histoire qui en a. Spengler a donc été dûment décrié sous divers prétextes, presque toujours par des personnes qui n'ont pas pris le temps de lire son œuvre et de comprendre ce qu'il essayait de faire. Son véritable crime est double.

Tout d'abord, ses découvertes rendent le mythe du progrès beaucoup plus difficile à défendre. Il a montré, entre autres, que chaque grande civilisation a eu son propre âge de raison, que les philosophies rationalistes déployées par chaque âge de raison ne sont que les croyances religieuses de cette culture, dont les numéros de série ont été effacés et une abstraction a été mise à la place du ou des anciens dieux, et que les âges de raison diffèrent parce que les civilisations diffèrent - l'apparente supériorité de notre âge de raison n'est que le reflet du fait qu'il répond mieux aux fantasmes idiosyncrasiques de notre civilisation, alors que les âges de raison des autres cultures répondaient plutôt aux fantasmes de ces cultures.

C'est une pilule difficile à avaler, bien sûr, mais il y a pire encore. Le second crime de Spengler, le plus important des deux raisons pour lesquelles il suscite tant d'hostilité de la part des penseurs approuvés de notre époque, est qu'il a fait des prédictions sur la base de ses découvertes - et ces prédictions se sont jusqu'à présent avérées exactes.  Il a souligné, par exemple, que d'autres sociétés approchant de la fin de leur âge de raison plongeaient dans d'énormes conflits opposant une classe privilégiée de ploutocrates manipulant les systèmes politiques d'une époque antérieure à ce qu'il a appelé le césarisme, c'est-à-dire la montée de leaders populistes insurgés capables de rallier les masses contre leurs prétendus supérieurs.  En 1918, ce processus était en cours ; l'histoire du vingtième siècle a été définie par ce processus, et un autre cycle est actuellement en cours.

C'est une autre prédiction de Spengler qui donne un contexte au retour d'Ayaan Hirsi Ali à la religion. Spengler a noté que le déclin de l'âge de raison de chaque civilisation entraînait une renaissance de ses formes religieuses antérieures, mais avec une différence. Au printemps d'une culture, les traditions religieuses se développent de manière organique, en s'inspirant fortement des traditions folkloriques et de la culture populaire de l'époque. Le renouveau de la religion traditionnelle dans le sillage d'un âge de raison, en revanche, est une croissance artificielle, façonnée par les préoccupations des classes intellectuelles d'une civilisation en déclin.

La seconde religiosité, comme l'a appelée Spengler, est formelle, ordonnée, tolérante, automnale. Elle ne peut guère être autre chose, car elle naît comme un refuge contre le chaos. Chaque civilisation commence par un âge de foi, où des récits archétypaux vivants, soutenus par de puissantes émotions collectives, définissent les structures de base de la pensée et de l'action.  À mesure que la civilisation mûrit, sa version du rationalisme - quelle qu'elle soit - dissout les anciens récits religieux, les remplaçant par un ensemble de récits séculiers qui prétendent offrir une forme de salut ici et maintenant en lieu et place des objectifs d'un autre monde de la religion. Inévitablement, cependant, le paradis sur terre n'arrive pas à temps et les récits séculiers se désagrègent, laissant la plupart des gens sans aucun récit culturel pour donner un sens et une direction à leur vie. La fuite vers la religion s'ensuit rapidement.

Pourtant, les personnes qui se réfugient dans la religion n'ont plus la mentalité qui a fait de l'âge de la foi ce qu'il était. Ils peuvent se forcer à croire aux récits religieux par un acte de volonté, mais ils ne peuvent pas embrasser les mythes et les légendes avec l'innocence sincère du printemps d'une culture. En 1023, le monde était tellement rempli de merveilles et de mystères que personne en Europe n'a eu de mal à croire qu'une personne suffisamment sainte pouvait naître d'une vierge, ressusciter d'entre les morts et s'élever dans les airs jusqu'au ciel sous les yeux d'une foule de témoins. Mille ans plus tard, la plupart des gens doivent faire un effort soutenu pour atteindre l'état de suspension volontaire de l'incrédulité dans lequel ces affirmations traditionnelles peuvent être acceptées. L'âge de la raison a laissé sa marque, et l'habitude de tester les affirmations par rapport à la logique et à l'expérience est difficile à perdre, même lorsque la logique et l'expérience ont déjà prouvé qu'elles étaient de frêles roseaux.

Il y a une autre différence, et elle est cruciale. Un âge de foi naît des décombres d'une civilisation déchue. Dans le cas qui nous occupe, ce n'est pas seulement le rationalisme classique qui s'est effondré - aux yeux d'un grand nombre de personnes qui ont assisté au déclin de Rome, une civilisation entière se réfutait elle-même, et elles ont embrassé le christianisme précisément parce qu'il représentait le rejet de tout ce qui échouait si manifestement autour d'elles. Des siècles plus tôt, lorsque l'âge de raison de la civilisation classique a implosé, les gens qui sont retournés en masse dans les temples des anciens dieux l'ont fait pour tenter de soutenir tout ce que les chrétiens ont rejeté par la suite. Ce sont donc avant tout les classes prospères et privilégiées qui ont été à l'origine de la seconde religiosité du monde classique, et ce sont les masses silencieuses du monde romain, celles qui ont obtenu peu d'avantages et supporté la plupart des coûts de la civilisation classique, qui se sont détournées des croyances traditionnelles de leurs sociétés aux premières rumeurs chuchotées sur un homme de la province de Judée né d'une vierge et ressuscité d'entre les morts.

C'est à partir des idées de Spengler que l'on peut le mieux comprendre la conversion d'Ayaan Hirsi Ali. Malgré ses origines dans une nation non industrielle, elle appartient à la classe intellectuelle mondiale : un auteur formé à l'université, une célébrité mineure parmi l'intelligentsia, le genre de personne que les grands médias remarquent et promeuvent. Je ne prétends pas savoir ce qui s'est passé dans son cœur lorsqu'elle s'est convertie au christianisme, mais l'essai qu'elle a publié sur le sujet ne mentionne guère la dimension spirituelle. Tout tourne autour de l'importance idéologique du christianisme comme base du libéralisme occidental et comme drapeau de bataille pour les conflits culturels à venir. En d'autres termes, elle est passée habilement du statut de représentante des nouveaux athées à celui de représentante de la seconde religiosité du monde occidental. Il me semble tout à fait probable que lorsque les historiens de l'avenir examineront la fin de notre âge de raison et le retour de la religion au centre de la place publique, ils utiliseront sa conversion comme un marqueur commode de la date à laquelle cela s'est produit.

Comme tout changement social d'importance, bien sûr, celui-ci ne se produit pas du jour au lendemain et, en fait, il se développe depuis un certain temps.  Cela explique en partie l'une des caractéristiques les plus étranges de la vie culturelle américaine moderne, à savoir la montée des déclarations publiques de satanisme dans des groupes qui, jusqu'à une date récente, rejetaient l'idée d'être liés à ce mouvement. L'adhésion des athées au satanisme au cours des dernières années a fait l'objet d'une grande attention de la part des médias, notamment parce qu'il s'agit manifestement d'une question de déguisement et d'illusion - les porte-parole du Temple satanique, le plus médiatique des athées de nos jours, insistent sur le fait qu'ils ne croient pas en un être surnaturel appelé Satan.  Pourtant, il existe un autre groupe impliqué dans ce processus qui reçoit moins d'attention, mais qui pourrait être au moins aussi important.

L'un des effets secondaires de mon activité d'auteur de livres sur l'occultisme est que j'ai passé plusieurs années à me rendre à des conventions et festivals néopaïens pour y donner des conférences, signer des livres, rencontrer certains de mes lecteurs et, d'une manière générale, faire du marketing en personne. Cela m'a permis d'être aux premières loges d'un changement très étrange dans la sous-culture néopaïenne. Dans les années 1990 encore, tous ceux qui faisaient partie de la scène wiccane se hérissaient à l'idée que la Wicca ait quelque chose à voir avec le satanisme.  Les autocollants indiquant "les sorcières guérissent" ("WITCH HEAL") faisaient fureur, et si vous demandiez à quelqu'un s'il pouvait utiliser la magie pour nuire à quelqu'un d'autre, vous pouviez compter sur un sermon sur la triple loi du retour - la croyance néopaïenne autrefois très répandue selon laquelle tout ce que vous faites, en bien ou en mal, vous revient comme un boomerang et vous restitue trois fois le bien ou le mal que vous avez envoyé.

Au début de ce siècle, cependant, cette maîtrise apparemment solide de l'éthique pratique de la magie a commencé à s'effriter. Ce qui avait commencé par ressembler à un jeu de rôle gothique avec des crânes et des pentagrammes inversés s'est transformé en une adoption délibérée de la magie maléfique, et finalement de la démonolâtrie - l'adoration des esprits maléfiques.

Bien entendu, la poignée de chrétiens qui l'ont remarqué se sont écriés : "Ha ! La vérité éclate au grand jour - ils adoraient les démons tout le temps !".  Mais je ne pense pas que ce soit exact. J'ai entendu un ton étrange, une sorte de fanfaronnade honteuse, de la part de nombreux néopaïens que j'ai observés alors qu'ils se précipitaient et tâtonnaient sur la pente glissante que je viens de décrire.

Cela s'est également produit au moment où la sous-culture néopaïenne a atteint son apogée et a commencé à perdre des membres : certains d'entre eux sont retournés à la sorte d'attitude matérialiste insipide qui relève plus de l'apathie que de l'athéisme, mais d'autres ont trouvé leur voie dans l'une ou l'autre branche du christianisme.

C'est la clé qui permet de résoudre cette énigme. Le christianisme a de nombreuses vertus, mais il a aussi ses péchés, et l'un d'entre eux est la mauvaise habitude d'oublier le neuvième commandement - vous savez, "Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain" - lorsque le prochain en question se trouve appartenir à une autre foi.

C'est cette même attitude douteuse à l'égard des faits bruts qui a conduit de bons chrétiens du Moyen-Âge à insister sur le fait que les juifs fabriquaient leur matzoh de la Pâque avec le sang de bébés baptisés. Cette attitude est encore bien vivante dans de nombreuses églises aujourd'hui, et les personnes qui, comme moi, appartiennent à des traditions religieuses alternatives sont fatiguées de la connaître.


Ce n'est pas n'importe quel type de faux témoignage qui est appliqué à la foi d'autrui. Ce qui se passe, avec une prévisibilité monotone, c'est que les chrétiens du type dont je parle ne peuvent pas se faire à l'idée que d'autres personnes puissent être en désaccord avec la vision chrétienne du monde. C'est ce qui explique l'insistance sur le fait que tout le monde, hors du bercail chrétien, prie secrètement Satan. Dans la vision du monde dont je parle, il est impensable que des gens puissent croire en d'autres divinités, ou en aucune divinité.  Ils doivent être là, obligatoirement, dans un des deux gradins, à encourager l'équipe de Satan ou l'équipe de Jésus.

Bien sûr, ce n'est pas du tout vrai - Satan est une figure de la théologie chrétienne, et dire que les druides (par exemple) adorent Satan sciemment mais secrètement est tout aussi stupide que de dire que les chrétiens adorent sciemment mais secrètement Balor de l'Œil maléfique, la plus importante des puissances maléfiques de la vieille mythologie irlandaise.

C'est pour cette même raison qu'il convient d'être attentif lorsqu'un grand nombre de personnes qui étaient auparavant conscientes de ce point commencent soudainement à agir de la manière dont l'extrémité la plus dogmatique de la scène chrétienne insiste sur le fait qu'elles agissaient réellement depuis le début.

C'est ce que font actuellement un grand nombre de néopaïens et d'athées qui se pavanent et rampent devant les statues de Satan, et la conclusion est évidente : ils redéfinissent leurs croyances actuelles en termes chrétiens, afin de pouvoir ensuite renoncer à ces croyances et devenir de bons chrétiens.

Ce n'est même pas une nouveauté. Ceux de mes lecteurs qui connaissent l'histoire culturelle de la fin du XIXe siècle se souviendront du crépuscule de l'extraordinaire renouveau de la magie en France. La scène occulte française a toujours aimé flirter avec les symboles diaboliques - ce qui lui a valu les foudres de la hiérarchie catholique de l'époque - mais à la fin du siècle, le flirt a cédé la place à un satanisme déclaré, qui à son tour a fait place à une fuite en avant vers l'église catholique.  William Butler Yeats, qui s'est souvent rendu à Paris au cours de ces années, a décrit ce changement dans son essai visionnaire "Per Amica Silentia Lunae", et cela a contribué à façonner sa vision de l'histoire cyclique - une vision qui, comme il l'a lui-même noté dans son livre "Vision", avait beaucoup en commun avec celle de Spengler.


La même chose s'est d'ailleurs produite en Amérique à la fin des années 1960. Un grand nombre de jeunes gens qui s'étaient éveillés, synchronisés et marginalisés, profitant des drogues abondantes et du sexe facile de la contre-culture, ont abandonné l'esprit de Woodstock pour celui d'Altamont dans les derniers jours de la scène hippie, avec des gestes occasionnels en direction du satanisme et d'autres choses du même genre.

Cela leur a permis de se couper les cheveux, de se raser, de revêtir les vêtements "classiques" qu'ils prétendaient mépriser, de trouver un accueil chaleureux dans les églises évangéliques de l'époque et de s'installer dans le style de vie américain ordinaire qu'ils avaient joué à rejeter.

L'utilisation sélective du neuvième commandement, mentionnée ci-dessus, joue souvent un rôle important dans ce genre d'activités. Ceux de mes lecteurs qui étaient présents à la fin des années 1970 et au début des années 1980 se souviendront peut-être de Mike Warnke, qui prétendait avoir été un grand prêtre satanique avant de se tourner vers Jésus, et qui a fait de cette affirmation une carrière réussie en tant qu'artiste chrétien avant qu'un magazine d'information chrétien ne se penche sur sa bonne foi et ne documente le nombre de fois où il s'était écarté de la simple réalité. 

Il suivait un chemin bien balisé ; plus d'un siècle auparavant, pour citer un autre exemple, une jeune femme canadienne du nom de Maria Monk avait attiré un public chrétien tout aussi enthousiaste en affirmant de manière tout aussi frauduleuse que, pendant sa (prétendue) période de religieuse, elle avait été l'esclave sexuelle du clergé catholique.  L'histoire présente une longue liste de personnages similaires, et il ne fait aucun doute que de nombreux autres viendront s'ajouter à cette liste dans les années à venir.

Beaucoup de ceux qui afflueront vers les églises chrétiennes dans les années à venir ont des motivations moins mercantiles, certes, mais cela ne veut pas dire que ce qui les pousse à revenir à la religion est de nature entièrement spirituelle.  C'est une chose de jouer au rebelle quand on peut encore compter sur tous les avantages habituels de la société contre laquelle on pense se rebeller. C'en est une autre de continuer à jouer la comédie quand on commence à voir cette société se fissurer et mettre en péril les avantages sus-mentionnés.

L'hégémonie mondiale des États-Unis est en train de se briser, et les accords économiques qui acheminent une part considérable de la richesse mondiale vers les États-Unis et leur cercle restreint d'alliés se brisent avec elle. Cela va inspirer une vague de personnes qui, dans le sillage d'Ayaan Hirsi Ali et d'autres, se tourneront vers le christianisme classique comme rempart contre un chaos qui est autant en eux que dans le monde qui les entoure.

Je ne pense pas qu'ils aient tort de le faire, ni d'ailleurs qu'ils aient raison.  C'est un élément normal du cycle historique, et les êtres humains sont généralement moins originaux et beaucoup moins individualistes qu'ils ne veulent le croire. Je voudrais cependant souligner que tout le monde n'a pas fait ce choix dans les civilisations passées, et que tout le monde ne le fera pas non plus cette fois-ci.  William Butler Yeats, qui a grandi dans une famille chrétienne, n'est pas retourné à l'église de sa jeunesse.  Lui et quelques autres membres de la scène occulte de sa génération ont regardé les foules qui avaient tâté de l'occultisme retourner en courant dans leurs différentes églises, ont haussé les épaules et ont continué leur travail. La qualité de l'enseignement et des pratiques occultes s'est améliorée une fois que les masses sont parties ailleurs - et j'ai vu une amélioration similaire commencer à prendre forme à notre époque.

La seconde religiosité a ses inconvénients. Digne, ordonnée, attachée à la défense des valeurs établies, elle tend à l'inanité, puis à la fossilisation.  Elle joue un rôle important dans l'histoire, car c'est à l'intérieur de la coquille rigide établie par le retour à la religion que l'héritage culturel d'une civilisation en déclin peut être trié, systématisé et coulé dans des formes qui peuvent survivre aux temps difficiles à venir.  Comme le souligne la Bible, cependant, l'esprit souffle où il veut ; il est indépendant des constructions culturelles de quiconque, et c'est à l'extérieur de la coquille érigée par la seconde religiosité que les premiers frémissements de l'âge futur de la foi se feront sentir.

Yeats a passé une grande partie de sa vie à guetter ces signes, et il a tissé cette attention dans sa poésie. En voici un exemple, "Les Mages" :

Maintenant comme en tous temps, je peux voir dans l’œil de l’esprit,
Dans leurs habits raides et colorés, ces pâles insatisfaits
Qui apparaissent et disparaissent dans les profondeurs bleues du ciel.
Avec leurs visages usés comme des pierres battues par les pluies,
Et tous leurs heaumes d’argent gigotant côte à côte,
Et tous leurs yeux constamment fixés, espérant trouver une fois de plus,
Insatisfaits par le tumulte du Calvaire,
Le mystère insoumis sur ce sol animal.

(Traduction Jacky Lavauzelle)

Le sol animal est notre humanité commune, symbolisée dans le mythe chrétien par les animaux de la crèche qui ont assisté à la naissance du Christ ; le mystère insoumis est l'esprit qui va et vient à sa guise, et non à la nôtre. À toutes les époques, la plupart des gens se convainquent que la forme que leur culture a construite pour abriter l'esprit a été établie pour toujours, et cette croyance n'a jamais été aussi passionnément affirmée que dans les premières années d'une seconde religiosité. Pourtant, en ce moment même, de nouvelles révélations se font jour dans les coins les plus pauvres de la campagne et dans les bidonvilles des pays qui ne seront jamais développés, et c'est de l'une ou de plusieurs d'entre elles que naîtront les formes qui donneront une vision et une orientation, dans les siècles à venir, à un nouvel âge de la foi.

(traduction par DeepL, Sombrevert et Doucepluie)

Le retour de la religion

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Publié le 17 Octobre 2023

Druide et Shaman : pour une définition religieuse et non sociologique

 

Au cours du « cheminement » dans le "néo-paganisme" ou plutôt les « religions libres », il est quelquefois difficile de définir sa pratique : ce que l'on « est » ou « devient » à travers des rituels et autres cérémonies religieuses.

Ceci vient de deux aspects : le premier, c’est la recherche personnelle intérieure qui fait qu’il est difficile de savoir spontanément à quel archétype, on s’identifie ou que l’on recherche. (un peu comme dans les RPGs/jeux de rôle quand il faut choisir la classe qui correspond le mieux à son style de jeu et à son « goût » (ses gènes, son âme ?) : Le grand barbare, le magicien raffiné, le barde séducteur, le prêtre amical, etc …; assez rapidement avec de la pratique, on identifie la classe qui nous correspond le mieux dans notre "for intérieur"). Il s’agit là d’une difficulté « micro » (microcosme) ou plutôt d’une démarche initiatique personnelle: Il est tout à fait normale et « sain » de se chercher dans une optique de réelle libération (religieuse ou non).

Mais il y a une autre difficulté, une difficulté « macro », liée à la définition même des termes.

Ainsi en va-t-il de trois termes utilisés, dans tous les sens, dans les « religions libres » par leur participants : Druide, Shaman, Sorcier (termes utilisés également mais de manière péjorative par les « religions cléricales » pour dénigrer ceux qui refusent leurs réponses dogmatiques).
 
Une définition claire des termes est nécessaire pour éviter la confusion dans la pratique, source de manipulation et de malheur. Il y a beaucoup de précédents historiques : ainsi le mot "mage". Historiquement ce terme désignait un "prêtre" chaldéen. Son sens est maintenant inverse puisque ce terme décrit, à notre époque, un adepte de la magie "personnelle" par opposition à la magie "cléricale". Mieux vaut donc définir les mots et la réalité qu'il représente pour éviter de s'égarer....ou d'être égaré.  
 
Sorcier/sorcière est ainsi étymologiquement celui qui prédit l’avenir (le "Sort" dans le sens de "Destin"). Stricto sensu, celui qui fait des "sorts" (= "enchantements") mauvais est le maléficier/maléficière. MAIS, entre l’étymologie et le sens commun un fossé s’est créé. Ainsi dans le Robert, la définition de sorcier est devenu « Personne qui pratique une magie de caractère traditionnel, secret et illicite ou dangereux. ». Dans les faits, le terme « sorcier » est devenu synonyme de « maléficier ».

L’égrégore de ce nom « sorcier » est très fort. Avec Harry Potter et « Charmed », le terme « sorcier » est devenu sympathique mais la réaction « populaire » arrive et il apparait clairement que le mot « sorcier » se charge à nouveau négativement : Ceux qui lancent des sorts contre tel ou tel homme politique en sont grandement responsables et en subiront les conséquences (le triple retour n’est pas un mythe…).

Je pense donc que ce terme est désormais à éviter pour éviter des problèmes graves. (Oui, une recherche de bouc émissaire est en train de démarrer et un sorcier ou une sorcière (voire plusieurs) ont toujours été les boucs émissaires parfaits lors des temps de crise).

Il reste donc deux termes pour définir une appartenance et un travail dans les « religions libres » : Druide ou Shaman (rappelons qu’un magicien, d’après la définition de Dion Fortune, ne travaille pas systématiquement dans le domaine religieux : un magicien/psychiste travaillent dans la Noosphére, un druide/shaman/spirite travaillent, eux, dans la Théosphére. Cf post sur la religion. Attention, petite subtilité, il peut y avoir des passerelles entre ces deux sphères).

Le sens de ces deux termes, Druide et Shaman, évoluent encore et leur évolution n'est pas exactement similaire même si très proche. 
 
Un peu de recul historique tout d'abord : Le terme « Shaman » date de 1700, il est repris dans le langage commun après l’exploration de la Sibérie par les russes. Le terme « Druide », lui, date de 1900, il fut popularisé lors des premiers rassemblements « celtes » en Bretagne et Angleterre. (Oui, je sais que le mot Druide vient de l’Antiquité mais il a commencé à être utilisé dans un sens commun uniquement depuis le revival des pays « celtes » vers 1900).

Voyons le sens originel de ces deux mots :

Le terme « shaman » désignait à l’origine un pratiquant d'un culte religieux à caractère extatique présent en Sibérie.

Le terme « druide » désignait, lui, à l’origine, un prêtre gaulois ou celtique, d’où son utilisation dans les pays « celtes » lors du « mouvement celte » du 19eme/20eme siècle pour s’émanciper du clergé chrétien (catholique, protestant ou anglican).

Il est manifeste que le sens de ces deux termes a évolué par rapport à la réalité qu’ils définissaient dans le passé.

Shamanisme est désormais un terme qui désigne toute pratique religieuse à caractère extatique (cf « Mircea Eliade, Chamanisme et pratique archaïque de l’extase » - titre révélateur même si le texte est plus nuancé) avec un aspect proche de la nature (sans doute parce qu'initialement le shamanisme est lié à des "sociétés primitives"). Ce terme s’est généralisé : alors qu’originellement il était uniquement sibérien ; il est maintenant utilisé de manière commune pour toutes « religions primitives » dans le monde : en Sibérie, sa patrie d’origine, mais aussi en Amérique (nord et sud), en Asie, en Afrique et même en Europe avec la sorcellerie (cf C. Ginzburg), bref le terme shaman sert maintenant à désigner une réalité religieuse présente partout dans le monde.

Le mot Druide (et "druidisme") est lui encore en mutation et pas tout à fait stabilisé dans un sens commun mais il est évident que le sens initial est en train d’évoluer. Que ce soit dans la pop culture ou dans les initiations actuelles, un druide est désormais très différent de sa définition historique de« prêtre gaulois ou celtique ». Le terme est lui aussi est en train de se généraliser vers un sens commun que l'on pourrait définir comme : "un personnage (ou une pratique) en lien avec l’ « autre monde », indépendamment de sa nationalité ou de son environnement". Il existe ainsi des druides en Amérique (sans parler de son omniprésence dans les jeux sur ordinateurs à l’échelle de la planète, il y a même un indien (d’Inde) qui a fait une vidéo sur youtube sur le druidisme et son rapport avec le monde, rapport complétement indépendant de l’aspect celtique). Ajoutons que comme le shaman, le druidisme est également associé de nos jours à la Nature, alors qu’à l’origine, c’était un « prêtre » proche des « prêtres grecs » et donc plutôt tourné vers la civilisation (cf JL Bruneaux).  

La sociologie et l'histoire sont ici dépassées par la religion.

En effet, si les deux pratiques (shamanisme et druidisme) démontrent aujourd'hui qu’elles sont des religions sans clergé (par la force des choses) et « autonome » (autonome dans le sens non lié à la société qui les porte et capable de survivre même sans technologie…ce qui à mon avis n’est pas le cas d'une grande partie des religions « new age »). Il semble y avoir une différence entre les deux qu’il est difficile de cerner d’un point de vue « extérieur » (sociologique par exemple).

Ce qui génère des discussions à n’en plus finir entre universitaires, historiens et/ou sociologues entre ce qui est shamanisme, ce qui ne l’est pas (par exemple, "la" religion maya ?….).

Pour le druidisme, c’est pire. L’aspect identitaire rajoute une couche politique à ce qui est d'abord un problème religieux. Mais le "druidisme" hypothétique du monde "indo européen" (yamnaya ?) est également un vaste sujet d'échange, quelquefois respectueux, entre universitaires, historiens et/ou sociologues. 

Pour sortir de ce débat sans fin (un peu comme dans un labyrinthe, il faut trouver un fil d’Ariane), il est nécessaire de de se pencher vers l’analyse des religions.

Et là nous avons un extraordinaire penseur religieux du 20eme siècle, Ioan Culianu (vous ne le connaissez pas ? Il est pourtant fondamental dans toute recherche religieuse sérieuse et la fin tragique de sa vie démontre le sérieux de ses travaux et de son engagement) qui a défini les deux modalités d’une approche religieuse.

Il y a en effet, selon lui, deux manières (opposées voire même contradictoires, il faut "choisir" l’une ou l’autre, chacune a des avantages et des inconvénients) d’approcher le « monde religieux ». C’est-à-dire le monde des consciences existant en dehors du « monde physique » :

·         La première consiste à passer un pacte avec des « consciences extérieures à nous » et à gérer cette relation dans un rapport interpersonnel. Généralement cette approche est à l’initiative de la (les ?) « conscience(s) extérieure(s) » qui appelle(nt) le « pratiquant ».

·         La seconde consiste à appliquer des méthodes pour déclencher et gérer ces relations avec des « consciences extérieures à nous ». Généralement cette approche est à l’initiative du « pratiquant » qui appelle la (les) « conscience(s) extérieure(s) ».

Le shamanisme est clairement devenu le nom usuel de la première approche (notamment à travers la danse cérémonielle, l’extase, l’art spontané, etc…).

Le druidisme est clairement en passe de devenir le nom usuel de la seconde approche (notamment à travers la géométrie sacrée, la méditation, le rituel, etc...).

Ainsi, les deux termes permettent de définir de manière beaucoup plus fine des pratiques religieuses au lieu d’un vague « shamanisme » ou « druidisme », qui souvent est le reflet, plus ou moins conscient d’un mépris du sociologue ou d’un clergé pour ces pauvres « ignorants primitifs » qui ne connaissent pas la véritable « Religion » ou le véritable « Athéisme ».

Attention toutefois à ne pas être trop simpliste :

Les deux approches sont contradictoires mais des pratiques qui se ressemblent peuvent exister dans l’un ou l’autre des cas même si la racine est très différente.

·         Un « druide » peut parfaitement participer à une danse festive et endiablée (!!!!) au fond des bois (cela remonte le moral et, à certains moments, tout le monde a besoin de décompresser ! Les étudiants ne me contrediront pas :-) )

·         Un « shaman » a intérêt à être très précis lors de certaines « préparations » et à ne pas faire une recette à l’instinct en suivant ce que lui souffle son «esprit familier ».

 
L’utilité d’avoir des mots purifiés (théurgie…) permet de clarifier beaucoup de pratiques en les sortant de l’aspect folklore (utile mais seulement sur certains "plans"). Ce qui permet de les adapter à sa propre pratique et d’améliorer son contact avec la Théosphère en comprenant la racine de pratiques "non mainstream".

·         Ainsi un amérindien qui s’isole, qui jeûne et qui veille est en train de faire du druidisme car c’est clairement l’équivalent d’une méditation, extrême mais méditation tout de même.

·         Une interprétation des rêves (tiens comme Freud, Daniel et Joseph…) est une pratique druidique (qui en l’occurrence est là validée par une expérience pluri-millénaire, exit le coté "pratique récente" des « religions libres »…)

·         L’utilisation de « substances naturelles » pour sa pratique (même si elles viennent de Bretagne ou du pays de Galles…qui a dit chouchen ? J ) s’apparentent clairement à du shamanisme et doit donc être traité avec tous les « garde fous » (notamment les souvenirs pluri-générationnelles) liés à cette modalité religieuse même si « c’est traditionnel » et « ma grand mère le faisait »….
 
·        Les Bacchantes, décrites par les auteurs de l'antiquité, sont clairement dans une pratique chamanique européenne. Relire l'œuvre Euripide (et quelques citations d'Héraclite) avec un regard religieux devient alors éclairant et théurgique sur le shamanisme.  
 
 
Notons qu'un "maléficier" peut apparaitre dans les deux systèmes religieux. Vous pouvez avoir un "maléficier shamanique" (skinwalker navajo ?) ou un "maléficier druidique" (l'actuel "maléficier" de nos campagnes décrit, notamment, par Dominique Camus)
 
Ces deux mots « shamanisme » et « druidisme » sont importants pour bien connaitre et comprendre la voie que vous choisissez et avoir une pratique la plus saine et la plus libératrice possible.
 
La prochaine fois : les deux clergés possibles suivant ces deux approches spirituelles ?

                  )O(                                                                                                                        /|\

 

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Publié le 10 Juin 2023

Traduction d'un article de John Michael Greer avec son aimable autorisation (original ici  https://www.ecosophia.net/on-magic-manhood-and-masculism/

Une des traditions qui a pris place au cours de la vie de ce blog est que chaque fois qu'il y a cinq mercredis dans un mois, les lecteurs ont la possibilité de voter sur le sujet que j'écris pour le cinquième article du mercredi. Au fil des ans, cela m'a amené sur des terrains complexes, et ce mois-ci ne fera pas exception à la règle. Lors des derniers votes, le sujet "masculinité sacrée et toxique" a commencé à recueillir une bonne part des suffrages, et ce mois-ci, il est arrivé un peu en tête de la compétition.

Laissé à moi-même, ce n'est pas un sujet sur lequel j'aurais choisi d'écrire. En partie, bien sûr, parce que tout l'enchevêtrement de questions résumées très imparfaitement par les mots "sexe" et "genre" est l'un des sujets les plus brûlants de l'heure. Je n'ai aucune objection à offenser les gens ; en fait, si un de mes articles ne suscite pas au moins quelques cris d'indignation de la part des deux camps retranchés dans lesquels les médias de masse ont poussé la plupart des Américains ces derniers temps, j'essaie de comprendre ce que j'ai fait de mal. Cela dit, j'aime orienter ces essais de manière à ce qu'au moins une partie de mon public comprenne ce que j'essaie de dire, plutôt que de simplement hurler comme une meute de banshees. Lorsqu'il s'agit de sexe et de genre, ce n'est pas vraiment facile de nos jours.

Certaines filles sont comme cela .....

Certaines filles sont comme cela .....

J'ai aussi beaucoup de vieux souvenirs désagréables liés à cette question. Enfant, j'ai trouvé que la définition culturelle de la masculinité qui m'a été imposée par les parents, l'école, les médias et d'autres enfants était une source fiable de problèmes. En partie, pour des raisons que je n'ai comprises qu'à l'âge de quarante ans, lorsqu'on m'a enfin diagnostiqué un syndrome d'Asperger, j'étais extrêmement maladroit lorsque j'étais enfant - pas une seule fois dans toute mon enfance je n'ai réussi à frapper une balle de baseball avec une batte, par exemple - et il n'y avait pas de place dans la mentalité collective de l'époque pour un garçon qui était totalement nul en sport et qui s'ennuyait à cause de cela. Mais ce n'est pas tout. Beaucoup d'autres choses qui faisaient partie de la culture masculine de l'époque ne m'intéressaient pas du tout. J'aimais porter mes cheveux plus longs que ce qui était à la mode pour les garçons, et je pleurais facilement, ce qui n'arrangeait rien. Je n'aimais pas les poupées ni les vêtements à froufrous, mais à part ça, oui, j'étais plutôt une fille manquée.

Compte tenu du climat actuel d'opinion sur le sujet, je dois probablement clarifier un détail avant de poursuivre. Je n'étais pas (et je ne suis pas) mal à l'aise avec le fait d'avoir un corps d'homme. Cela ne me dérange pas le moins du monde d'avoir un truc externe plutôt qu'un truc interne entre les jambes, et lorsque j'ai eu l'âge de commencer à me laisser pousser la barbe, j'en ai été ravi. (J'ai décidé à l'âge de dix ans que ce que je voulais être quand je serais grand, c'était Gandalf, alors la pilosité faciale m'a semblé être un pas dans la bonne direction). De nos jours, il arrive souvent qu'un garçon qui ne correspond pas exactement aux stéréotypes actuels de la masculinité en herbe soit poussé par les conseillers scolaires et l'industrie médicale à se redéfinir comme une fille. Il n'y a pas de place pour les garçons et les filles manqués dans notre société frénétiquement rigide, où tout le monde doit être enfermé dans le trou le plus étroit possible.

....et certains garçons sont comme cela. A vous de faire avec

....et certains garçons sont comme cela. A vous de faire avec

J'ai atteint l'âge adulte bien avant que cela ne devienne à la mode, et je n'ai donc pas couru le risque d'être victime de brimades et de pressions pour me faire castrer et m'astreindre à un cocktail à vie de médicaments "affirmant le genre", avec une liste d'effets secondaires désagréables plus longue que votre bras. J'ai simplement dû supporter une enfance où les normes de masculinité imposées par les médias étaient des armes utilisées contre moi à chaque fois que l'occasion se présentait. Dans la seconde moitié de mon adolescence, j'ai découvert le mouvement appelé à l'époque "psychologie humaniste", qui a été presque entièrement effacé de notre mémoire collective de nos jours parce qu'il offrait aux personnes en difficulté un grand nombre d'options qui n'impliquaient pas la chirurgie et les médicaments. Ce mouvement m'a notamment montré qu'il existe de nombreuses façons d'être un homme, et que la plupart d'entre elles n'ont rien à voir avec les caricatures de la masculinité que les médias et les masses d'esprit poussent avec tant d'enthousiasme sur tout le monde.

Mais bien sûr, j'ai découvert une autre ressource au cours de ces mêmes années, qui a eu un impact encore plus profond sur mon approche de ma propre masculinité et, plus généralement, sur les questions de sexe et de genre. Oui, il s'agit de la philosophie occulte. Je vais en parler dans cet article. C'est en partie parce que je n'ai aucune idée de ce que le terme "masculinité sacrée" peut signifier ; comme son homologue "féminité sacrée", il est utilisé librement dans certains cercles ces jours-ci, mais il a à peu près autant de sens pour moi que, disons, "gravité sacrée". La masculinité, comme la féminité (ou la gravité), n'est ni sacrée ni profane. C'est un mode d'existence fondamental, qui se manifeste dans toutes les choses et toutes les personnes à un degré plus ou moins élevé, et qui fonctionne sur tous les plans, de la matière à l'esprit.

Mais il y a une autre raison pour laquelle j'ai l'intention de parler de ce que la philosophie occulte dit sur la masculinité. Ce que j'ai découvert pendant mon adolescence, et ce que j'ai découvert encore plus généralement depuis, c'est que les anciens enseignements occultes sur le sexe offrent un moyen de d'évacuer une grande quantité de balivernes et d'apporter de la clarté à un domaine d'expérience que notre société s'efforce de rendre aussi opaque que possible. Montez donc à bord et préparez-vous ; nous sommes sur le point de nous lancer dans une brève étude de ce que les mages d'une époque plus ancienne appelaient "le Mystère du Sexe".

William Walker Atkinson. Oui, il était les trois "trois initiés" qui ont écrit le Kybalion.

William Walker Atkinson. Oui, il était les trois "trois initiés" qui ont écrit le Kybalion.

Nous pouvons commencer par l'un des classiques de la philosophie occulte, le Kybalion de William Walker Atkinson. L'un des sept principes fondamentaux de l'occultisme énoncés par Atkinson est le principe du genre : "Le genre est dans tout ; tout a ses principes masculins et féminins ; le genre se manifeste sur tous les plans." Prenez le temps de réfléchir à ce que cela implique. Le principe masculin crée en projetant quelque chose hors de lui ; le principe féminin crée en recevant quelque chose en lui. Si cela vous déroute, pensez à la façon dont les êtres humains et les autres mammifères se reproduisent. Il s'agit d'un reflet, sur le plan matériel, de la manière dont toute création se produit : un principe projette, l'autre reçoit, et une nouvelle vie naît.

En ce sens, le genre est une fonction universelle, dont le sexe biologique n'est qu'une expression sur un plan. En outre, rien dans le cosmos n'est entièrement masculin ou entièrement féminin. Toutes les choses et toutes les personnes incarnent ces deux principes, mais elles ne le font pas toutes de la même manière.

Dans la philosophie occulte, nous parlons de différents plans d'existence. Les êtres humains sont conscients de quatre d'entre eux, bien que notre culture insiste pour n'en traiter qu'un seul comme réel et relègue les trois autres dans une sorte de limbes de non-réalité subjective. Pour les occultistes, en revanche, le plan matériel - le type de réalité dont nous faisons l'expérience avec nos cinq sens matériels - n'est ni plus ni moins réel que le plan éthérique, le plan de la force vitale, le plan astral, le plan de l'imagination et des rêves, et le plan mental, le plan de la signification et de la valeur. En tant qu'êtres humains, nous sommes des âmes qui s'incarnent dans des corps tirés de la substance de ces plans ; nous avons actuellement des sens qui perçoivent les trois premiers de ces plans, et nous sommes en train d'évoluer vers les sens nécessaires pour percevoir le quatrième.

Chacun de ces corps a d'ailleurs son propre genre. Le genre du corps matériel - c'est-à-dire son sexe - est déterminé par ses chromosomes et exprimé par ses caractéristiques sexuelles primaires et secondaires à la naissance. Les genres du corps éthérique, du corps astral et de la gaine mentale (techniquement parlant, nous n'avons pas encore de corps pleinement développé sur le plan mental, mais la gaine fonctionne comme la première ébauche d'un corps) sont déterminés par des structures sur leurs propres plans. Ils sont également indépendants les uns des autres. En d'autres termes, le sexe de vos corps éthérique et astral et de votre enveloppe mentale peut ou non être le même que celui de votre corps matériel.

Il est presque universel d'avoir deux corps de chaque sexe, et dans la plupart des cas, les corps sont de sexe alterné. Ainsi, si vous avez un corps matériel masculin, vous avez très probablement un corps éthérique féminin, un corps astral masculin et une enveloppe mentale féminine. De même, si vous avez un corps matériel féminin, vous avez très probablement un corps éthérique masculin, un corps astral féminin et une enveloppe mentale masculine. Une grande partie de ce qui est considéré comme "masculin" ou "féminin", et une grande partie des différences entre les sexes, sont le reflet de ces polarités alternées.

Sur la magie, la virilité et le masculinisme

Je prendrai un exemple volontairement grossier : la masturbation. La plupart des hommes, s'ils se masturbent beaucoup, finissent par se sentir faibles et vidés. La plupart des femmes, si elles font la même chose, finissent par se sentir encombrées et congestionnées. Pourquoi ? Lors d'un rapport hétérosexuel ordinaire, la force vitale, la substance du plan éthérique, s'écoule de la femme (qui a généralement un corps éthérique masculin) vers l'homme (qui a généralement un corps éthérique féminin). L'homme qui se masturbe se sent faible parce qu'il n'a pas de partenaire pour lui fournir de l'énergie éthérique ; la femme qui se masturbe se sent encombrée parce qu'elle n'a pas de partenaire pour puiser et recevoir son énergie éthérique. C'est très simple.

La même chose fonctionne sur les autres plans. Il est très courant, par exemple, que les artistes, écrivains, musiciens et autres créateurs de sexe masculin aient besoin de la compagnie d'une femme pour créer ; ce n'est pas qu'ils tirent des idées ou des images des femmes de leur vie, c'est un sens plus subtil et plus profond de l'inspiration. Les femmes artistes, en revanche, ont rarement un besoin comparable. Pourquoi ? La plupart des hommes ont des gaines mentales féminines, qui ont besoin d'être fécondées ; la plupart des femmes ont des gaines mentales masculines, qui ont besoin d'inspirer plutôt que d'être inspirées. Sur le plan astral, c'est l'inverse. Avez-vous remarqué que la fanfiction - la fiction qui prend un ensemble de personnages et de décors existants dans les médias et en fait des histoires - est surtout une habitude féminine ? C'est parce que la plupart des femmes ont un corps astral féminin et que leur imagination fonctionne mieux lorsqu'elle est fécondée par des images et des idées provenant d'une source extérieure.

Notez cependant la présence de mots tels que "la plupart" dans les paragraphes ci-dessus. Il est très rare que les hommes (c'est-à-dire les personnes ayant un corps matériel masculin) aient un corps éthérique masculin ; et tout aussi rare que les femmes (c'est-à-dire les personnes ayant un corps matériel féminin) aient un corps éthérique féminin. Les deux corps supérieurs sont cependant assez souvent inversés, c'est-à-dire que chez environ dix pour cent de la population, on trouve des hommes avec des enveloppes mentales masculines et des corps astraux féminins, et des femmes avec des enveloppes mentales féminines et des corps astraux masculins. Je suis un exemple. Mon imagination a besoin d'être fécondée par des images et des idées extérieures, c'est pourquoi ma fiction la plus réussie à ce jour est essentiellement une fanfiction élaborée de H.P. Lovecraft. D'un autre côté, je n'ai pas besoin d'une fertilisation mentale par la compagnie d'une femme comme le font tant d'écrivains et d'artistes masculins. Je suis heureux en ménage, mais ma femme n'est pas obligée d'être ma muse.

Sur la magie, la virilité et le masculinisme

Il ne s'agit là que de deux des nombreuses variations de la structure du corps subtil de l'homme. La plupart des autres ont trait à des aspects moins généraux des corps subtils. Les différences entre l'orientation hétérosexuelle et l'orientation homosexuelle sont une fonction de certaines de ces autres variations. Il en va de même pour de nombreuses complexités subtiles de polarité qui attirent certaines personnes les unes vers les autres et en repoussent d'autres. Le sexe est complexe ; l'amour, la romance, l'attirance et la répulsion mutuelles - tout cela est complexe, et tout cela est lié à la structure complexe du genre humain et de l'anatomie subtile de l'homme. Les tentatives de simplification au service d'une idéologie arbitraire ou autre (qu'elle soit libérale, conservatrice ou autre) échouent inévitablement et provoquent un grand nombre de malheurs humains.

L'existence humaine est complexe. Essayer de la restreindre par le biais d'une idéologie rigide n'est utile qu'aux personnes qui veulent vous contrôler.

L'existence humaine est complexe. Essayer de la restreindre par le biais d'une idéologie rigide n'est utile qu'aux personnes qui veulent vous contrôler.

Des livres entiers ont été écrits sur les dimensions occultes du sexe. J'ai un tel livre en cours de rédaction, qui se concentre sur la magie de la polarité, l'art de sublimer l'énergie érotique à des fins magiques. Cependant, je pense que j'ai suffisamment couvert le sujet pour passer à ce que je soupçonne que la plupart des lecteurs qui ont demandé ce billet veulent que j'aborde : l'expérience complexe et difficile d'être un homme dans la société américaine d'aujourd'hui.

Il devrait être clair, pour commencer, que le genre n'est pas une chose simple. Il est tout aussi erroné d'insister sur le fait que votre sexe physique n'a pas d'importance que d'insister sur le fait que votre sexe physique définit tout ce que vous êtes et ce que vous devez penser, ressentir et faire. Le fait d'avoir un truc intérieur ou un extérieur entre les jambes, d'avoir ou non des chromosomes Y (et tous les changements biochimiques complexes que leur présence ou leur absence entraîne), fait une grande différence, mais ce ne sont pas les seules choses qui font une différence. En outre, il existe de nombreuses façons différentes d'être un homme ou une femme ; si vous ne correspondez pas au stéréotype actuellement en vogue de votre sexe matériel, cela ne signifie pas que vous êtes de l'autre sexe, mais que le stéréotype ne fonctionne pas pour vous. Une société qui fait de la place aux garçons et aux filles manqués et aux autres sera plus saine et plus humaine qu'une société qui refuse de le faire - à condition, bien sûr, que les droits conférés à ceux qui s'écartent de la majorité ne soient pas autorisés à fouler aux pieds les droits de ceux qui ne s'en écartent pas.

Pourtant, l'enchevêtrement de la masculinité dans l'Amérique d'aujourd'hui ne se résume pas à une incapacité à saisir les points que nous venons d'évoquer. Une approche indirecte est utile ici, alors prenons un moment pour parler de ce qui a lancé la deuxième vague de féminisme dans le sillage de la Seconde Guerre mondiale.

Bienvenue en Suburbia. Le prix d'entrée comprend vos amitiés, votre santé mentale et votre âme.

Bienvenue en Suburbia. Le prix d'entrée comprend vos amitiés, votre santé mentale et votre âme.

L'essor des banlieues américaines dans les années d'après-guerre a entraîné un grand nombre de changements culturels radicaux, mais l'un d'entre eux n'a pas reçu l'attention qu'il mérite : la destruction de la culture féminine dans les classes moyennes. Avant la suburbanisation, la plupart des femmes de la classe moyenne vivaient dans des quartiers huppés des villes et des villages, où les maisons, les entreprises et les lieux de rencontre se côtoyaient. Une très grande partie des femmes appartenaient à des clubs, des loges et d'autres groupes sociaux réservés aux femmes, et les interactions moins formelles étaient constantes - il était courant que les femmes se réunissent pour prendre un café, partager des projets de travail, s'entraider et pour bien d'autres raisons. Cela a favorisé l'émergence d'une culture féminine distincte, variant selon la classe sociale et l'origine ethnique, mais présente dans toute l'Amérique.

Les banlieues ont détruit tout cela. Par définition, les banlieues étaient constituées de vastes étendues de logements isolés des commerces et des lieux de rencontre, et la fuite vers les banlieues a perturbé des réseaux familiaux et amicaux vieux de plusieurs générations, laissant les banlieusards isolés dans des quartiers d'étrangers. Les hommes avaient leur lieu de travail, mais au lendemain de la guerre, les femmes de la classe moyenne étaient censées quitter le marché du travail et rester isolées et s'ennuyer dans leurs maisons de banlieue. Pendant ce temps, la propagande de saturation diffusée par le nouveau média qu'est la télévision leur imposait de nouvelles définitions de la féminité - des définitions qui avaient été élaborées principalement par des hommes, incarnant des perspectives masculines, sans aucun apport pertinent pour la vie réelle des femmes.

Il est remarquable de voir combien de personnes prétendent aujourd'hui que cela n'est jamais arrivé

Il est remarquable de voir combien de personnes prétendent aujourd'hui que cela n'est jamais arrivé

C'est ce qui a rendu inévitable l'explosion du féminisme de la deuxième vague. Il est possible d'imposer une terrible répression à une population et d'obtenir son obéissance - cela s'est produit à d'innombrables reprises au cours de l'histoire. Ce que vous ne pouvez pas faire, c'est les soumettre à une dissonance cognitive extrême.

"C'est votre vie, c'est ce que signifie être une femme, et si vous n'en êtes pas contente, c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas chez vous".

C'est le message que les médias d'entreprise, l'industrie de la publicité et le corps médical ont transmis aux femmes jour et nuit, jusqu'à ce qu'elles commencent à riposter.

Mais c'est l'après-révolution qui importe ici. L'une des ironies les plus classiques de l'histoire est que la plupart des révolutions finissent par copier au moins certaines des pires caractéristiques du régime qu'elles ont renversé. L'un des thèmes centraux de la révolution féministe était donc la destruction de la culture masculine des classes moyennes et l'abolition des espaces sociaux masculins qui permettaient aux hommes de se définir. Au lieu de cela, les hommes des classes moyennes sont désormais censés accepter de nouvelles définitions de la virilité qui sont en grande partie fabriquées par les femmes, incarnant des perspectives féminines, sans aucun apport pertinent pour la vie réelle que mènent les hommes. Nous nous trouvons actuellement dans les toutes premières phases de l'explosion que cette explosion de dissonance cognitive rend inévitable.

Il s'agit d'un ensemble de comportements aussi rigides que ceux de n'importe quel expert en séduction.

Il s'agit d'un ensemble de comportements aussi rigides que ceux de n'importe quel expert en séduction.

Ce qui me fascine dans la montée de ce que nous pourrions appeler le masculinisme, c'est la proposrtion dans laquelle il a copié les stratégies réussies du premier mouvement féministe. Les lecteurs d'un certain âge se souviendront de Helen Gurley Brown qui défendait la "Cosmo Girl", la femme libérée dont la vie entière était axée sur l'exploitation des hommes pour tout ce qu'elle pouvait obtenir. L'équivalent masculin exact est l'expert en séduction - pick up artist en anglais (PUA) - pour une raison quelconque, les masculinistes d'aujourd'hui adorent les acronymes - dont la vie entière se concentre sur l'exploitation des femmes pour obtenir tout ce qu'il peut obtenir. Bien entendu, la Cosmo Girl utilisait le sexe à des fins de manipulation, et le PUA utilise la manipulation à des fins de sexe ; à part cela, il n'y a pas grand-chose de différent entre eux.

Les lecteurs d'un certain âge se souviendront également des féministes séparatistes des années 1970, dont la stratégie principale consistait à se construire une vie réussie dans laquelle les hommes n'avaient pas leur place - vous vous souvenez de tous ces macarons et autocollants sur lesquels on pouvait lire "Une femme sans homme, c'est comme un poisson sans bicyclette" ? Leurs équivalents masculinistes sont les "Men Going Their Own Way" (MGTOW), qui ont adopté la même stratégie consistant à se construire une vie réussie dans laquelle les femmes n'ont pas leur place. Il y avait aussi les militants des droits de la femme de la même décennie ; leurs équivalents sont les militants des droits de l'homme d'aujourd'hui (MRA), qui sont tout aussi stridents et belliqueux que les militants des droits de la femme l'étaient si souvent à l'époque.

Vous vous souvenez d'eux ? De nos jours, un nombre croissant de jeunes hommes ont des idées similaires.

Vous vous souvenez d'eux ? De nos jours, un nombre croissant de jeunes hommes ont des idées similaires.

Le potentiel de ces stratégies se mesure notamment aux dénonciations frénétiques et pleines de salive que ces trois petits mouvements marginaux de la frange culturelle reçoivent de la part de la partie féministe de la culture d'entreprise dominante. (Le simple fait qu'il soit possible de parler de "l'extrémité féministe de la culture d'entreprise dominante" de nos jours montre bien à quel point les choses ont changé au cours des cinquante dernières années). Je suppose que les femmes impliquées dans cette réaction ne se souviennent pas à quel point les dénonciations masculines équivalentes dans les années 1970 ont contribué à faire connaître le féminisme et à convaincre les femmes qui n'étaient pas encore impliquées dans le mouvement féministe que les droits des femmes avaient une raison d'être. Je m'attends à ce que le même effet profite au masculinisme au cours de la prochaine décennie.

Je ne dis pas, d'ailleurs, que c'est une bonne chose. Je ne dis pas non plus que c'est une mauvaise chose. Je souligne simplement que c'est en train de se produire. La mythologie du progrès a empêché un grand nombre de personnes de voir que le fait de forcer le changement dans une direction se traduit très souvent par un mouvement égal et opposé dans l'autre direction. Tout comme la licence sexuelle débridée de l'ère géorgienne en Grande-Bretagne a préparé le terrain pour la répression sexuelle stricte de l'ère victorienne, et que l'extrême pudibonderie victorienne a ensuite rendu inévitable la révolution sexuelle du 20e siècle, la tentative de redéfinir les femmes dans des termes définis par les hommes a donné lieu à une tentative comparable de redéfinir les hommes dans des termes définis par les femmes, et la montée du féminisme a entraîné la montée correspondante du masculinisme.

Il serait utile, pour ne pas utiliser un mot plus fort, que les hommes et les femmes acceptent que les personnes des deux sexes (et la très petite fraction de personnes intersexuées) aient le droit de se définir, de créer des espaces et des cultures qui leur conviennent et de négocier les relations entre les sexes, plutôt que d'essayer d'exploiter les positions de pouvoir pour imposer des règles arbitraires qui avantagent l'une ou l'autre des parties. Il serait également utile que les personnes qui adorent parler de "masculinité toxique" reconnaissent que la féminité toxique est tout aussi courante et que les deux sont des sous-ensembles d'une gamme beaucoup plus large de comportements toxiques que les êtres humains, quel que soit leur sexe, s'infligent les uns aux autres. Les êtres humains sont ce qu'ils sont, un mélange étourdissant de vertus et de vices, de forces et de faiblesses, de sacré et de toxique.  Mais c'est un idéal à garder à l'esprit, et ceux qui essaient de s'en rapprocher pourraient découvrir qu'il présente finalement certains avantages.

Traduction DeepL, Lombre et SombreVert

Si vous voulez approfondir le sujet un autre article est ici : La métaphysique du sexe

 

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Publié le 20 Août 2022

Quelques notes sur la Réincarnation

Avec l'aimable autorisation de John Michael Greer

https://www.ecosophia.net/a-few-notes-on-reincarnation/

Au début de ce mois, lorsque j'ai réalisé qu'il y aurait cinq mercredi en août [2017] plutôt que les quatre habituels, j'ai demandé aux lecteurs de ce blog quel sujet ils voulaient que j'aborde dans le billet du cinquième mercredi. Une grande partie de ceux qui ont répondu voulaient entendre ce que j'avais à dire sur la réincarnation.

C'était un peu une surprise, pour être franc. Je n'ai jamais été sûr du nombre de mes lecteurs qui se rendent sur ce blog parce qu'ils partagent mon intérêt pour la spiritualité ésotérique occidentale, par opposition au nombre de ceux qui s'y rendent parce qu'ils partagent mon inquiétude quant au déclin accéléré et à la chute imminente de la civilisation industrielle occidentale, ou simplement parce qu'ils m'ont entendu dire quelque chose de scandaleux dans un podcast et qu'ils attendent de voir ce que je vais dire ensuite. Les multiples casquettes que je porte en tant qu'historien des idées, critique social, écologiste, romancier, étudiant en occultisme, mage opérationnel et ancien chef d'un ordre druidique contemporain, pour ne citer que quelques exemples, donnent lieu à des conversations parfois étranges.

Cela dit, je n'ai pas d'objection particulière à discuter de la réincarnation.  C'est une partie importante des enseignements de la spiritualité occulte occidentale depuis que cette dernière existe, et les druides anciens et modernes sont assez bien connus pour leur croyance en cette forme particulière d'existence post- (et pré-)mortem. C'est donc parti, nous allons couvrir un très grand nombre de connaissances très rapidement, alors attachez votre ceinture et accrochez-vous.

Avant d'entrer dans les détails ectoplasmiques de l'ensemble particulier d'enseignements sur lesquels j'ai tendance à m'appuyer à ce sujet, il est probablement nécessaire de parler un peu de la nature de la connaissance. Nous savons tous plus que ce que nous pouvons prouver. Si je vous demande d'identifier la photo de votre mère parmi une collection de photos d'identité judiciaire, par exemple, il y a de fortes chances que vous puissiez le faire en un instant ; si je vous demande de le prouver, vous aurez peut-être du mal à le faire, et si je vous demande de me présenter les raisons pour lesquelles vous savez qu'un visage particulier appartient à votre mère, vous risquez d'être perplexe - et ce, malgré le fait que vous puissiez probablement, en fait, identifier votre mère en un coup d'œil.

De même, la plupart d'entre nous ne peuvent pas prouver que l'Antarctique existe, ni témoigner de son existence sur la base de notre propre expérience. Nous nous fions aux rapports des personnes qui y sont allées et à l'improbabilité qu'elles soient toutes impliquées dans une conspiration visant à nous tromper. Un groupe de personnes qui croient que la Terre est plate, que le pôle Nord en est le centre et que le bord où la Terre se perd dans le néant se trouve au-delà des océans du Sud - je crois savoir que la Flat Earth Society affirme aujourd'hui quelque chose de ce genre - pourrait insister sur l'existence d'une telle conspiration, et il serait étonnamment difficile de les convaincre du contraire ; même si vous les embarquiez dans un avion pour les emmener à McMurdo Sound, ils pourraient prétendre que vous les avez en fait emmenés au Groenland et que vous avez fait venir des pingouins de Patagonie pour les tromper.

Nous sommes dans une situation similaire en ce qui concerne la vie après la mort. Il existe en fait une masse importante de données soutenant la théorie selon laquelle un centre de conscience individuel survit à la mort du corps physique et renaît dans un nouveau corps après un certain temps. Le regretté Dr Ian Stevenson a passé toute sa carrière universitaire à recueillir des témoignages de jeunes enfants qui semblent se souvenir de détails de vies antérieures, et il s'est appuyé sur les travaux d'un grand nombre de chercheurs de l'époque où la "recherche psychique", comme on l'appelait alors, n'avait pas encore été chassée de l'académie par les jurons d'un matérialisme superficiel. Les recherches sur les expériences de mort imminente concordent parfaitement avec les résultats des recherches sur les souvenirs apparents de vies antérieures, à tel point que dans la plupart des autres domaines, un consensus aussi détaillé sur le sujet suffirait à justifier l'acceptation de la réincarnation comme hypothèse de travail jusqu'à ce qu'une réfutation solide apparaisse.

Bien sûr, ce n'est pas ce qui se passe, car nous avons nos équivalents de la Flat Earth Society de ma métaphore. Les athées matérialistes insistent sur le fait que l'existence post- (ou pré-)mortem n'existe pas - pourquoi ? Parce qu'ils le disent, voilà pourquoi. Les croyants des religions abrahamiques les plus dogmatiques rejettent d'emblée la réincarnation pour à peu près les mêmes raisons. Ainsi, chaque élément de preuve de l'existence de l'Antarctique est rejeté par les deux camps, et ceux d'entre nous qui trouvent utile de collecter des informations sur les pingouins, les calottes glaciaires, le mont Erebus et d'autres sujets tout aussi interdits et impies doivent aller chercher des points de données dans des endroits étranges.

Il y a bien sûr une différence importante entre l'Antarctique et le sujet de ce billet. Très peu de personnes se rendent en Antarctique, alors que chacun d'entre nous traversera un jour les océans du sud de ma métaphore et posera le pied sur le territoire au-delà. Connaître un peu les pingouins, les calottes glaciaires, le mont Erebus, etc. avant d'y aller est donc une très bonne idée.

Une autre remarque. La théorie de la réincarnation varie quelque peu dans le détail d'une tradition à l'autre. La version que je prends le plus au sérieux est celle que l'on trouve dans les enseignements du renouveau druidique ; elle correspond le mieux à ma propre expérience ainsi qu'à celle de l'érudition mentionnée ci-dessus, et elle s'accorde également bien avec ce que nous savons de l'évolution biologique, qui (comme nous le verrons également en temps voulu) a son propre rapport avec le sujet. Ceux de mes lecteurs qui aiment à croire que les êtres humains ont une origine et une destinée distinctes des autres êtres vivants n'apprécieront probablement pas ce qui suit ; ceux qui, comme les druides l'ont généralement fait, reconnaissent qu'une seule vie coule à travers toutes choses trouveront peut-être ce qui suit plus agréable.

Ceci étant dit, poursuivons. La première chose à garder à l'esprit lorsque l'on parle de réincarnation est que, dans la perspective qui nous occupe, l'un des principaux postulats de la pensée moderne - la notion que la matière est la réalité ultime, et que la vie et la conscience sont des produits de la matière - est une véritable foutaise. Pour l'occultiste, l'esprit est la réalité ultime, et la matière est le dernier et le moins stable des produits de cette réalité. La matière nous semble solide uniquement parce que c'est ce que nos sens perçoivent. Ainsi, la mort du corps physique n'est pas la fin de la personne réelle ; c'est l'élimination d'une couche extérieure, pas beaucoup plus significative que ce qui se passe chaque nuit lorsque vous enlevez vos vêtements.

Ce que nous appelons "esprit" n'est pas une chose simple. Pour reprendre une phrase de C.S. Lewis, il ne s'agit pas d'une sorte de brume vague qui plane autour de la matière ; c'est une réalité complexe, compliquée, extrêmement puissante, et toutes les autres choses en découlent dans un processus en cascade qui descend de niveau en niveau. Parmi beaucoup d'autres choses, c'est ainsi que se déroule une vie humaine. Un esprit se déplace sur les plans, en prenant des corps mentaux, vitaux et matériels ; c'est un peu comme si vous mettiez un gant de soie sur une de vos mains, puis un gant de cuir souple sur la soie, et enfin un gant de fer sur le cuir. Lorsque la vie prend fin, à son tour, le processus se déroule en sens inverse : le gant de fer s'enlève, puis le gant de cuir, puis le gant de soie, laissant la main nue et libre.

Dans le langage d'une école d'occultisme, la partie de vous qui perdure de vie en vie s'appelle l'Individualité. Il ne s'agit pas de votre personnalité, ni de votre esprit pensant. Vous pouvez la percevoir très faiblement si vous regardez quelque chose, puis vous prenez conscience du vous qui regarde ce que c'est, et vous essayez de remonter jusqu'à la pure présence consciente en vous qui perçoit ce que vous regardez. C'est ce que vous êtes entre les vies - un centre de conscience, avec certaines capacités innées de volonté et de représentation, et avec une capacité à se souvenir de ce qu'il a expérimenté.

La Personnalité, dans le langage de cette même école, est un reflet de l'Individualité qui prend forme dans l'individu incarné, à partir de la petite enfance et qui mûrit lentement jusqu'à la maturité. À moins que vous n'ayez fait beaucoup de méditation, la personnalité est probablement ce à quoi vous pensez quand vous dites "moi". C'est un ensemble d'habitudes : habitudes d'action, de perception, d'émotion, de pensée, etc. Au cours de votre vie, ces habitudes façonnent l'Individualité, favorisant certains types de volonté et de représentation au détriment d'autres. Ce remodelage de l'Individualité affecte ensuite la Personnalité, ainsi que les corps vital et physique, que vous aurez dans vos vies futures.

D'où vient l'Individualité ? Dans les enseignements druidiques, le royaume minéral est l'expression matérielle d'une immense masse d'Esprit indifférencié. Les anciens écrits l'appellent le Chaudron d'Annwn d'où naissent les âmes. (Annwn se prononce AN-oon.) Des individualités sont toujours formées à partir du chaudron, mais il ne s'agit pas d'individualités humaines, pas au début. Voici comment un vieux dialogue d'enseignement le formule :

"Q. Qu'étais-tu avant de devenir humain dans le cercle d'Abred ?

"R. J'étais en Annwn la chose la moins capable de vivre, et la plus proche possible de la mort absolue, et je suis arrivé sous toutes les formes, et à travers toutes les formes capables d'un corps et d'une vie, à l'état d'humanité le long du cercle d'Abred, où ma condition a été sévère et douloureuse pendant un âge des âges, depuis que j'ai été séparé en Annwn des morts".

Abred - qui se prononce AH-bred - est la condition de l'incarnation physique. Chacun d'entre nous, selon l'enseignement, a commencé à s'incarner en tant que "chose la moins possible capable de vivre" - en termes modernes, notre premier corps était la sorte la plus simple d'organisme unicellulaire, avec des corps mentaux et vitaux rudimentaires, le tout entourant un minuscule point de conscience. Chacun d'entre nous a vécu d'innombrables vies brèves dans de telles formes, et chacune de ces vies a ajouté une couche de potentiel au point de conscience, un ensemble d'actions et de réactions possibles. Vie après vie après vie, en passant par d'innombrables formes vivantes, nous avons acquis les potentiels de volonté et de représentation qui nous ont rendus capables de prendre des formes plus complexes, d'explorer des comportements plus variés, d'absorber une gamme plus riche d'expériences et d'aller plus loin.

Les enseignements druidiques ne romancent pas les conditions dans lesquelles ce processus se déroule ; "ma condition était sévère et grave", dit le dialogue, et avec raison. Les personnes qui rêvent d'être des loups, par exemple, ont rarement réfléchi à ce que cela signifie réellement : une vie passée à sprinter dans la nature dans un effort désespéré pour combler le mal rongeant de la faim pendant un petit moment en déchirant une autre créature vivante en morceaux avec les dents, avec la mort par famine comme menace constante d'un côté et la mort par blessure, infection ou tir humain comme possibilité omniprésente de l'autre. Les anciens écrits du Druid Revival comprennent cela. Pour traverser Abred, disent-ils, il est nécessaire pour chacun de nous d'être tout, de tout savoir et de tout souffrir.

En entrant dans ces vies, avec leur être, leur savoir et leur souffrance, l'Individualité prend le corps mental qui deviendra finalement une Personnalité, et les corps vital et physique qui donnent à l'Individualité un ancrage dans le monde de la matière. Ce n'est pas une question de choix, pas encore - rappelez-vous, l'Individualité commence comme un minuscule point de conscience vacillant, incapable de faire beaucoup plus que de percevoir le faible filet d'expérience qui passe par les organelles d'une bactérie.

Un processus semblable au réflexe dirige ces innombrables premières vies ; il se transforme en un processus semblable à l'instinct au fur et à mesure que l'Individualité mûrit. Le choix n'entre pas en ligne de compte avant que nous n'atteignions la limite supérieure d'Abred, où il se trouve à la frontière du prochain royaume de l'être. Encore et encore, l'Individualité entre dans la vie incarnée, s'adapte et grandit, puis retourne en elle-même pendant un certain temps pour absorber les résultats de chaque vie et se préparer à la suivante. C'est aussi vrai au niveau humain qu'aux autres niveaux, d'ailleurs ; la réincarnation n'est pas immédiate, sauf parfois dans le cas des enfants qui meurent très jeunes et n'ont donc pratiquement aucune expérience à absorber. La réincarnation n'est pas immédiate, sauf parfois dans le cas d'enfants qui meurent très jeunes et n'ont donc aucune expérience à absorber. La plupart d'entre nous sont hors de l'incarnation pendant au moins quelques années, et souvent beaucoup plus longtemps, entre une vie et la suivante.

N'oubliez pas non plus que tout ceci se déroule dans le temps profond. Il a fallu plus d'un milliard d'années avant que les premières Individualités qui ont émergé d'Annwn sur cette planète ne dépassent le stade d'organisme unicellulaire. Les choses se sont accélérées par la suite, puisque ces âmes pionnières ont établi des modèles que les âmes ultérieures ont repris plus rapidement, mais nous pouvons évaluer la lenteur de l'ensemble du processus dont nous parlons en observant le temps qu'il a fallu aux organismes multicellulaires vraiment complexes pour évoluer.

Nous ne savons pas quand les premières âmes ont atteint la limite supérieure d'Abred, le point où les êtres humains existent maintenant. La plupart des traditions occultes s'accordent à dire que c'était il y a très longtemps et que notre espèce n'est que la forme actuelle, ou l'une des formes actuelles, dans laquelle les Individualités qui ont travaillé à travers les potentiels d'Abred s'incarnent avant de continuer - ou pas. Il n'est pas acquis que d'autres formes de ce type possédaient, ou possèdent, des organes tels que des mains capables de manipuler le monde comme nous le faisons ; un éventail assez large de preuves suggère que les baleines et les dauphins sont tout aussi conscients et intelligents que nous, et qu'ils se situent donc également à la limite supérieure d'Abred, même s'ils ne possèdent pas le type d'organes qui leur permettraient de bricoler des outils en pierre, des claviers d'ordinateur et autres.

La limite supérieure d'Abred est le point où l'instinct commence à céder la place au choix, où la Personnalité commence à être capable de réfléchir à ses propres activités et à s'expérimenter comme quelque chose qui se distingue de ses propres habitudes d'action, de réaction, et ainsi de suite. Cela ne signifie pas, soit dit en passant, qu'elle a le "libre arbitre" dans un sens absolu. Pour commencer, il dispose simplement d'une petite marge de manœuvre, la capacité d'alimenter tel ou tel ensemble d'émotions, tel ou tel train de pensées. C'est encore essentiellement automatique - et chacun d'entre nous, si nous réfléchissons honnêtement, admettra qu'il y a beaucoup d'automatisme même dans nos moments les plus conscients.

Dans ces circonstances, lorsque nous atteignons pour la première fois le niveau humain (ou l'équivalent sous d'autres formes), nous nous plantons assez systématiquement. En échappant à la guidance de l'instinct, nous établissons des schémas maladroits de perception, d'émotion et de pensée qui nous plongent dans un certain nombre de conséquences gênantes et désagréables. Le temps et la souffrance nous apprennent à choisir des habitudes qui donnent de meilleurs résultats et, au fil des vies, nous devenons plus réfléchis, plus conscients de nos pensées et de nos sentiments, plus habiles à utiliser notre liberté limitée de volonté et, en temps voulu, nous commençons à prendre conscience de ce centre de conscience immobile au cœur de tout, notre individualité. Notre perspective change, parfois lentement, parfois d'un seul coup, et nous faisons l'expérience de nous-mêmes tels que nous sommes réellement : pas des corps, pas des vies, pas des personnalités, mais des centres de pure conscience incarnés dans des formes mentales, vitales et matérielles...

...et la porte s'ouvre sur Gwynfydd.

Gwynfydd (ça se prononce GWUN-vuth) signifie "la vie lumineuse". Ce n'est pas le paradis, pas si vous entendez par là un point final statique où les détenus s'épanouissent pour l'éternité. Ce n'est pas la fin d'un voyage, mais le début de la seconde moitié du voyage. Dans Abred, l'Individualité est noyée dans l'instinct, enfermée dans des formes mentales, vitales et matérielles, oublieuse de sa nature ; dans Gwynfydd, l'Individualité est éveillée et consciente d'elle-même, avec un accès complet à ses souvenirs de ses vies précédentes, et ses formes mentales, vitales et matérielles sont choisies librement. On peut dire qu'en Abred, l'esprit est enveloppé dans la matière, tandis qu'en Gwynfydd, la matière est happée par l'esprit. L'incarnation physique, dans le sens où l'on atterrit dans un autre corps fraîchement né, se termine lorsque Gwynfydd commence ; la manifestation matérielle est toujours disponible, mais sous des formes autres qu'humaines.

Ayant atteint Gwynfydd, l'individualité a maintenant une immensité de développement devant elle. La tradition veut qu'il y ait dans Gwynfydd des êtres qui sont aussi loin des êtres humains que les êtres humains sont loin des bactéries. Les druides qui préfèrent le vieux langage polythéiste se réfèrent à ces êtres supérieurs comme à des dieux et des déesses ; les druides qui préfèrent les termes chrétiens - oui, il y a beaucoup de druides chrétiens - s'y réfèrent en termes des neuf hiérarchies d'anges.  Ces êtres étaient autrefois là où nous sommes maintenant. Nous avons la capacité d'arriver là où ils sont maintenant - et au moment où nous y arriverons, ils seront quelque chose qui dépassera encore plus nos imaginations. (Les êtres humains ne seront jamais les meilleurs dans le cosmos druidique. Faites avec.)

Tout le monde arrivera-t-il à Gwynfydd ? C'est l'enseignement des druides depuis l'aube du Revival. Cela ne signifie pas que vous ne pouvez pas vous planter et retarder votre arrivée par de vastes cycles de temps. C'est aussi un enseignement druidique que les gens retombent régulièrement dans des formes d'être moins complexes et moins réfléchies - oui, cela signifie des formes animales - lorsqu'ils tournent le dos à leurs capacités humaines, et qu'ils doivent alors se hisser à nouveau jusqu'à la frontière d'Abred, étape par étape douloureuse, et essayer à nouveau. Ils peuvent le faire autant de fois qu'ils le souhaitent, et se payer autant de misère qu'ils le veulent. Finalement, au fil du temps, ils y parviendront.

Bon, complétons quelques détails. Tout d'abord, les plantes appartiennent à un courant d'évolution spirituelle différent du nôtre, et ont leur propre modèle à peu près parallèle, avec lequel nous n'interagissons qu'à distance. Il existe également d'autres types d'êtres, dont beaucoup n'ont pas le même type de corps matériel que nous.  Le monde de l'occultisme traditionnel est un lieu surpeuplé, plein de vies et d'esprits à de nombreux niveaux différents, et les êtres humains ont été remarquablement ignorants de la plupart des autres êtres qui existent. Recevrons-nous une facture pour cela en temps voulu ? Sans aucun doute.

Deuxièmement, remarquez que cette façon de voir les choses explique pourquoi l'humanité dans sa masse ne semble jamais progresser spirituellement ou moralement. L'humanité est un stade par lequel passent les individualités. Celles qui atteignent Gwynfydd ne renaissent pas en tant qu'êtres humains, alors qu'il y a toujours plus d'âmes qui naissent en tant qu'humains pour la première fois et qui refont toutes les erreurs habituelles. Pensez à la façon dont l'eau qui coule sur un rocher dans un torrent de montagne forme une vague, qui reste en place même si l'eau change constamment. L'humanité est ainsi faite - et par conséquent, le monde humain ne deviendra jamais une utopie ou ne résoudra jamais tous ses problèmes, car le Gwynfydd est quelque chose que chacun de nous doit atteindre lui-même, en tant qu'individu, à son propre rythme.

 

Troisièmement, cette façon de penser permet également de relier trois phénomènes que la plupart des gens ne relient pas : l'explosion sans précédent de la population humaine au cours du dernier siècle environ, les déclins tout aussi drastiques des populations de toutes les autres espèces de grands mammifères intelligents au cours du même intervalle, et l'étonnante confusion avec laquelle la plupart de la population humaine avance aveuglément vers un avenir misérable. Du point de vue de la réincarnation, ce qui se passe est simple : un très grand nombre d'individualités vivent actuellement leur toute première vie humaine, sans plus de succès que d'habitude. Ils s'en sortiront ; au cours des prochains siècles, alors que la population humaine se réduira à quelques pour cent des niveaux actuels par le biais des processus normaux de contraction démographique, nous pouvons également nous attendre à ce que la spéciation rapide, habituelle à la suite d'une crise d'extinction, donne naissance à de nouvelles formes animales, et les Individualités en question pourront traiter leur brève expérience de l'humanité, mûrir davantage leurs capacités et tenter le saut vers Gwynfydd dans de meilleures conditions plus tard.

Quatrièmement, de ce point de vue, une fonction essentielle de la religion d'une part, et des écoles de mystères d'autre part, est de guider les gens vers Gwynfydd. La religion le fait en amenant les gens à entrer en relation avec un ou plusieurs de ces êtres dont j'ai parlé plus haut, ceux qui sont aussi loin de nous que nous sommes loin des bactéries, afin qu'ils puissent nous aider à faire le saut. Les écoles de mystère le font en enseignant des exercices qui nous aident à nous éveiller à la connaissance de soi et à nous débarrasser des autres obstacles qui nous empêchent de faire le saut. Il n'y a pas de contradiction entre ces deux approches, c'est pourquoi beaucoup de gens font les deux, dans la communauté occulte et en dehors.

Il y a bien d'autres choses à faire, mais à ce stade, je pense que je vais ouvrir la discussion, sous réserve des règles habituelles, bien sûr.

 

Traduction par Sombrevert et DeepL

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Publié le 15 Août 2022

L'érotisme particulier de la sorcellerie européenne
Des signes montrent clairement qu'il est temps de prophétiser (certains pourraient penser maudire ....) sur le sujet de l'érotisme du chamanisme européeen (chamanisme européen dans le sens accès à la Théosphére à la "mode" européenne).
 
En introduction, comme souvent avant de parler d'un sujet délicat, il est nécessaire de clarifier les mots (un type d'exorcisme/conjuration, classique chez tous les mages/sorciers/chamans/druides expérimetés). Ceci donne plus de force à la prophétie.
 
Le premier mot sera Erotisme :
 
Deux sens, intéressants ce post, existent dans le petit larousse
 
1- Description et exaltation par la littérature, l'art, le cinéma, etc., de l'amour sensuel, de la sexualité.
2- Recherche psychologique et physiologique de l'attraction et de l'excitation sexuelles. 
 
Je fais définir le premier sens comme étant l'erographie (en y ajoutant l'aspect psychologique du second sens, sinon à quoi sert l'art ....)
et le deuxième (en ne gardant que l'aspect physiologique) comme étant l'eropraxis.
 
Profitons en pour définir le terme obscéne qui vient du latin obscenus : de mauvais augure.
 
Est donc obscene ce qui (mis en lumière par le pouvoir de la réflexion ou de la divination) engendre des conséquences problématiques pour vous ou d'autres (REDE, triple retour, etc ...).
 
Prenons également pornographie : composé de "porno" (prostitution) et "graphie" (description). La différence apparait clairement entre érotisme et prostitution : Le rapport à l'argent, au gain de ressource (qui fait l'objet d'une initiation dans les covens/loges/cercles "sérieux"). Nous ne parlerons pas de prostitution dans cet article. C'est un tout autre débat.
 
Donc l'érotisme dans la sorcellerie européenne....
 
Lors des divers réflexions sur les pratiques magiques et religieuses à travers le monde, j'ai eu beacoup de mal à définir ce qui faisait un cas particulier de la sorcellerie européenne. Certains auteurs estimant, a mon sens avec juste raison que la sorcellerie (telle que définie dans la "renaissance" européenne au moment de la chute "luciférienne" de la religion chrétienne donc à partir du 14eme, 15 eme siècle)  n'était "que" du chamanisme européen (E Wilby, C.Ginzburg).
Le familier étant, par exemple, l'équivalent de l'esprit gardien du chamanisme "classique" (sibérien, amérindien, etc .....).
 
Mais manifestement, il manquait un aspect important pour bien définir le chamanisme européen par rapport aux autres chamanismes.
 
La clé m'a été "donnée" lors du dernier sabbat : Il s'agit de l'erographie lié au chamanisme européen, la sorcellerie (dont la Wicca, entre autres, fait partie). Ceci apparaissant notamment dans la préparation au sabbat et dans le sabbat lui même.
 
 
♫ Allez au sabbat, sans chemise, sans patalon ♫

♫ Allez au sabbat, sans chemise, sans patalon ♫

♫ Flamme, flamme, flamme, fais nous voir le ciel ♫

♫ Flamme, flamme, flamme, fais nous voir le ciel ♫

Pour ceux qui ne sont pas convaincus de l'importance de l'Eros dans la magie et comme ce texte sera court ("ce qui est simple est faux, ce qui est compliqué est inutilisable"), je vous recommande le livre "Eros et Magic" de Ioan Culianu afin d'avoir une étude approfondie et subtile du sujet.
 
 
Il est évident que l'Eros de Culianu ne concerne pas seulement l'érotisme mais ici je vais me concentrer sur l'érotisme (sur la partie érographique pour être précis, la partie magique de l'eropraxis est manifestement surestimée).
Son importance dans la magie varie suivant les auteurs et les pratiques. A la suite du travail de W. Reich (avant qu'il ne parte dans le délire d'orgone), je suis convaincu que son utilisation est importante mais cela nécessiterait encore d'autres développements qui seraient malgré tout incomplet (Etonnament ce sujet, est rarement étudié sérieusement par les scientifiques et les magiciens).
 
Cet aspect erographique présent dans la sorcellerie europénne est d'origine dans le culte à la mode européenne. Ainsi si l'on fait remonter la sorcellerie aux pratiques de l'antiquité, les cultes extatiques possédaient cet aspect (cf la villa des mystères, les Bacchantes d'Euripide,la Crète minoenne et sa déesse aux serpents, etc...).  Ce n'est pas simplement un ajout des inquisiteurs au 14eme/15eme siècle, c'est un substrat bien plus ancien.

 
Alors on ne vient plus aux soirées ?

Alors on ne vient plus aux soirées ?

A mon sens, son maintien à travers plusieurs millénaires dans diverses pratiques est la preuve de son efficacité dans le temps.
 
Mais alors pourquoi un tel problème pour le maintenir dans les cultes ?
 
Comme défini dans d'autres posts, une pratique religieuse avec une erographie explicite va évidemment attirer dans les "réunions" des entités (humaines ou non) qui voudront se servir de l'énergie dégagée pour des fins propres.(entités contre lesquels, tout pratiquant/coven/loge/cercle  doit disposer de protections adéquates dans la Realsphere mais également dans la Noosphére et la Théosphére). Ceci a déjâ été traité, je n'y reviens pas.
 
Il est donc tentant et plus facile d'abandonner cette erographie suivant le "contexte" (ex: scandale des bacchanales).
 
Mais il existe des raisons plus subtiles.
 
La première, c'est l'incompétence, l'ignorance et/ou la mauvaise foi.
 
Quelques exemples :
 
Pour être utile, l'énergie dégagée par les pratiquants ne doit JAMAIS être consommée. Donc si au cours du rituel (ou en dehors .... "traditionellement", comptez un délai de 3 ans pour éviter tout parasitage), il y a passage de l'erographie à l'eropraxis, la magie s'arrête : l'énergie accumulée est dissipée. Ce que vous avez fait est inutile sur le plan magique. Si le but était eropratique, c'est du gaspillage de ressource (pour créer le rituel) et si les choses ne sont pas explicites c'est également une manipulation (et c'est contre le Rede et l'éthique, bonne chance pour gérer le choc en retour, car il aura lieu, aussi sur que 1+1=2).
 
Il est nécessaire de faire un distinguo (cf rituel d'ouverture/fermeture) entre le sabbat et la vie "moldue". Il peut être jouissif d'imaginer tous ses fantasmes durant le sabbat (des tenues rigolotes, des pratiques alternatives, etc ....) mais la vie (et nortamment la vie en société, en famille ou en couple) implique des valeurs très différentes du délire cathartique proposé dans le sabbat.
Enfonçons par exemple le clou sur le point douloureux régulièrement évoqué dans les articles sur le néopaganisme : le polyamour (avec toutes les structures alternatives : trouples, amour libre, etc....) est une structure fragile qui subsiste très difficilement et/ou couteusement à travers le temps. Comment le sait-on ? les communautés hippies ont tenté le truc IRL au 20 eme siècle avec des souffrances (notamment des femmes) documentées.  Un autre exemple ? Un harem nécessite un empire pour être maintenu dans le temps.
Il est donc dangereux d'associer, sans caveat, la pratique religieuse avec des modèles d'organisation qui n'ont pas fait leur preuve dans le temps. Par contre faire réfléchir le coven a cet aspect permet de faire gagner de la maturité ses membres (tout le paradoxe de la religion qui comme le feu est dangeux mais utile et irremplaçable).
 
Un autre point (souvent "oublié") est que le délire sabbatique (ou "bacchanique") doit déboucher (au moins temporairement) sur une purification/catharsis.
 
Dans la religion antique, on peut le voir dans le lien permanent entre Dionysos et Apollon (avec Apollon qui laissait annuellement  la place à Dionysos à Delphes) et, dans la mythologie, dans la montée à l'Olympe de Dionysos avec Ariane (oui cela donne un rôle très différent à Thésée et au Minotaure selon cette interprétation, là encore il y en a pour des esbats à expliquer :-) ). Ce Dionysos final est différent du séducteur des bacchantes ......
 
C'est également le sens que l'on peut donner à "la source qui ne s'épuise pas" du christianisme (religion manifestement liée, à son origine lors des premiers siècles de notre ère, aux écoles à mytères existantes dans l'empire romain).
Développons :
Un plaisir érotique (grahique ou pratique) demande sans arrêt un renouveau (oui un peu comme les drogués ....). A terme, le but doit donc être de passer à autre chose.... (Sinon cela augure du destin de sisyphe, un mauvais augure, c'est donc obscène SI il n'y a pas de porte de sortie)
Je vais donc faire l'hypothèse d'une transformation du Kykeon grec (le "Vin Rituel" des Mystères ) dans le Vin rituel chrétien qui aboutit, dans le christianisme, in fine à l'eau (un "retour aux sources"), eau qui est devenu inépuisable dixit jésus à la samaritaine. (un lien avec l'eau bénite à disposition des fidèles contrairement au vin de messe ?)
Etait ce la même chose dans les mystéres antiques complets dont il ne subsiste que la trace chrétienne ? Je vais faire l'hypothèse que oui.
Ce point de vue est soutenu par la magie sexuelle orientale ("tantrisme", "main gauche") où là aussi la débauche ne dure qu'un temps et doit aboutir à autre chose. Notons que cette "débauche" faisait que cette pratique est considérée comme plus efficace mais comme plus dangereuse.
 
Bien évidemment, cela ne veut pas dire que TOUT rituel de sorcellerie européenne doit avoir ce type de connotation erographique (explicitement ou implicitement).
 
Artémis est typiquement une déesse qui ne veut pas ce type d'approche dans son culte (Actéon peut en parler). D'où sans doute son rôle auprès des enfants, notamment son rôle de protection !!!!!
Là le rituel extatique est remplacé par une chasse symbolique donc sur un besoin aussi impérieux que le besoin sexuel mais différent et connu par tous les humains : le besoin de se nourrir.
Un rituel (sabbat/esbat ou un autre nom de pour éviter le confusion ? ) avec Elle (ou Athéna(se défendre) ou Hestia (prendre soin des autres et de soi) par exemple) est donc tout à fait indiqué pour avoir un rituel sous une influence très protectrice avec un sous-jacent aussi puissant mais très différent du sabbat "classique".
 
Bien évidemment le cote fluffy bunny de la sorcellerie européenne est totalement approuvé et reconnu. ( Kiki petite sorcière ou Sabrina n'ont pas à être changé, c'est très bien comme c'est).
L'érotisme particulier de la sorcellerie européenne
D'autres dieux peuvent être invoqués sans faire appel à la "particularité européenne" mais attention la dérive ou la manipulation sont possibles donc prudence ....
Ainsi :
- Héphaistos peut ainsi être inclu dans un rituel à connotation geek (mais attention Vénus n'est pas loin).
- Les muses peuvent également être conviées (mais attention au lien avec les dionysies ....)
etc....
 
Je pense que je peux m'arrêter là. L'aspect érographique est évident dans le sabbat ainsi que son importance dans la pratique magique et c'est un aspect légitime bien que non-exclusif de la sorcellerie européenne. Important :  ne pas oublier le REDE et la loi du triple retour (ou l'indispensable loi éthique de votre religion) même pour cette "magie du sabbat". Donc "ne pas faire n'importe quoi" même si c'est le grand prêtre ou la grande prétresse qui le demande. Vous êtes juge et responsable toujours !
 
Cet aspect "erotico-explicite" à ma connaissance est particulier au "chamanisme européen" (la "sexualité sacrée orientale", classiquement mentionnée me semblant poursuivre un autre but, cf ci dessous). Il me semble être à maintenir pour au moins deux raisons :
 
1- C'est un facteur de stabilité dans le temps pour le "chamanisme européen" : Si tant de gens s'intéressent initialement à la sorcellerie, je fais le pari que l'iconographie du sabbat y est pour beaucoup et qu'en plus c'est un facteur de motivation important pour travailler sur soi dans la durée. (il n'y a qu'à voir le nombre de rituels d'amour dans l'histoire de la magie/sorcellerie/religion .....)
 
2- Il vaut mieux nommer clairement les choses. il me semble préférable de présenter l'érographie de la sorcellerie de maniére explicite et légitime. Freud et l'église catholique chrétienne ont "démontré", quelquefois à leur corps défendant, que la "sublimation" de cette énergie peut conduire à des aberrations. Mieux vaut travailler sur l'erographie qui est déjâ une image de l'éropraxis que sur une image de l'image de l'eropraxis (avec des dérives supplémentaires possibles).
Les pratiques religieuses qui veulent transcender cet aspect (sous prétexte que "notre évolution est supérieur à cet instinct") sont à ma connaissance régulièrement victime d'un puissant choc en retour (cf les Bacchantes d'Euripide dont c'est le thème). Il faut plutot faire avec et purifier au fur et à mesure. C'est à la fois plus sain et plus sécurisant.
 
Bref cette "petite" part thaumaturgique erographique me semble être utile pour la théurgie personnelle de toute religion sérieuse, dont la sorcellerie européenne. Et en plus c'est un aspect culturel avec une légitimité compléte. Merci l'inquisition ! Ce n'était pas voulu consciemment par les inquisiteurs mais, hasard ou volontés divines, la pratique érographique a été transmise dans la pratique religieuse européenne de base.
 
Mais au dela de ce aspect à "petite échelle", la sorcellerie européenne, avec cet aspect, génére un autre défaut structurel mais là à "grande échelle" : un ennemi très très puissant et permanent.
 
En effet toutes les civilisations dans lesquels nous, humains, évoluons a souvent sa propre manière d'organiser et d'utiliser l'erotisme.
Notamment à travers les avatars de la civilisations (actuellement les états) qui veulent controler cet aspect de la psyché humaine pour contrôler l'élevage d'humain et motiver certains comportements (la valkyrie ou Marianne qui "guident" les soldats, ahwahnee azteque, geisha, hetaire, porné de Solon, les 72 vierges, femmes nues omniprésentes sur les publicités et la propagande, etc ....).
La tarte à la crème étant la prostitution sacrée selon Hérodote qui m'apparait comme un Etat qui fait en sorte que tout le monde ait accès à l'éropraxis à travers une erographie cultuelle (Ishtar ......) pour avoir la paix sociale. Or acheter la paix sociale au moyen d'une prostitution étatico-religieuse d'esclaves semble pour le moins discutable .....
 
Il s'agit là manifestement d'une thaumaturgie d'état pour assurer la continuité de l'état (habillée sous un discours religieux "opium du peuple").
 
Attention, cela ne veut pas dire qu'il faut être systématiquement contre ce que propose un état, les raisons d'un choix étatique peuvent être tout à fait rationnels et éthiques.
 
Mais un état peut avoir des comportements non éthiques car sa finalité est d'abord de durer, l'éthique individuelle passe après.... si elle passe.
 
De base, avoir un regard critique, notamment sur la sexualité, n'est pas accepté par un état (ou par un sous-groupe de l'état) car c'est une remise en cause d'un des principaux outils de domestication de l'humain par l'état (oui un état composé lui même d'autres humains, d'où la mise en place dans les psychismes de boucle de rétroaction et de perversités d'où le sorcier doit s'extraire).
 
Il faut donc avoir de bons arguments mais basiquement, même si la question est légitime, la Civilisation et les états n'apprécient que modérement que quelqu'un ait un comportement qui ne respecte pas le canon voire pire : puisse faire des émules et interroger son organisation interne car souvent cela implique un changement d'élite. D'où peut-être l'explication de l'absence de recherches sérieuses sur ce sujet par les mages et les scientifiques .......
 
C'est pour cela que le principal adversaire du sorcier/chaman/druide/etc.... n'est pas l'inquisiteur mais le théologien pontife : Celui qui fixe ce qui est "bien" ou "mal". (cf la "violence institutionnelle" de Bourdieu). L'inquisiteur n'est que l'instrument, c'est le pontife théologien qui affonte en réalité le sorcier.
 
Or le pontife apparait quand le lien est établi entre une religion et un état. Il a donc l'appui de l'état (police, tribunaux, argent, etc ....) et des consciences "endormies" ou "complices" ( la "conscience populaire"). Ce pontife théologien dispose donc de multiples moyens d'écraser le sorcier/druide/chaman sans passer par la case "explications théologiques et éthiques".
 
En bref, le sorcier a, au maximum, la hutte de Baba yaga pour lutter contre la Cathédrale (j'aime beaucoup cette image pour parler du clergé qui entoure et fossilise la religion et à fusionner en partie avec l'état).
Un profil bas, une stratégie de fuite et un message d'éthique clair (rede) sont donc des protections indispensables pour ne pas être vu comme une cible par les agents de conformité (cf "principe de Lucifer").
 
Mais ce n'est pas un duel perdu d'avance. Régulièrement au cours de l'histoire, quand les étoiles sont alignées (divination again), des messies (avec l'aide des prophétes les ayant précédés et ayant préparés les esprits en questionnant les pratiques) réussisent à renverser des Cathédrales. Par exemple : Moise, Jésus, Gandhi, Paul Atréides (ah, non lui il n'est pas encore venu :-) . Mais rapidement une cathédrale se reconstitue (après Jésus par exemple) et tout est à refaire. Mais l'alternative étant de retourner à un mode de vie proche du chasseur/cueilleur, il semble plus intéressant de gérer le cycle de la cathédrale....en étant initié.
 
et donc la prophétie :
 
Si la wicca, en particulier et le chamanisme européen, en général, veulent survivre, il faut maintenant laisser tomber l'instrumentalistion "petite politique" (ecologie, féminisme, etc....) qui a été lié à l'égrégore de la sorcière en 1979.  (on peut toujours faire de l'écologie, du féminisme mais sans y mêler la religion : le mélange est beaucoup trop explosif cf la saga de Dune pour comprendre ce qui arrive à un message religieux instrumentalisé).
 
Avec cette libération politique, la sorcellerie doit accepter son erographie ou elle sera absorbée dans l'égrégore de la nouvelle religion qui arrive, une religion totalitaire. (Plusieurs religions sont en lice, dont une religion écologique, l'égregore final dépendra de la résolution de ce "match").
 
La chance de la France ? Contrairement aux pays anglo-saxons, elle a toujours su trouver un juste milieu pour traiter de l'érographie du sabbat au sérieux sans la prendre au sérieux.
 
Un exemple profane (qui a traversé quelques décennies, preuve de sa solidité)
(notons l'aspect égalitaire des tenues de l'homme et de la femme pour les deux premiers couplets)

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Publié le 3 Octobre 2021

Essai sur Wotan par C.G. Jung

Voici une traduction d'un texte de 1936 de C G Jung qui reconnait l'apparition, dans la psyché du peuple allemand d'alors, de quelque chose de supérieur à un simple phénomène économico-politique.

Le moins que l'on puisse dire : en son temps, ce texte est prémonitoire.

L'intérêt actuel de ce texte est, au moins, double :

- montrer que le ou les fameux dieux existent et que leur nature est différente de ce qui est généralement compris ou décrit par le "commun" (la séparation d'une mer en deux est "un peu" au delà de la capacité divine. Cela fait une histoire merveilleuse et pédagogique mais ne doit pas être pris en compte littéralement. La résurrection est elle dans ce cas ?)

- montrer quelle est l'utilité d'une étude de la religion (qui au vu de cette présentation ne peut rester, à terme, la simple répétition de rituels et/ou de formules). Ceci permet de comprendre (et peut être prévoir, qui a dit divination ? ) l'air du temps/zeitgeist au delà de l'aspect matériel.

En clair, c'est un texte fondamental (et dense ....)  pour comprendre les religions et leur "capacité politique" (et pour pouvoir y échapper en tant que religieux et effectuer un "vrai" travail religieux, il faut connaitre cet aspect)

Les érudits parmi les irreligieux pourront établir des passerelles entre cet essai et "la psychologie des foules" de Gustave le Bon ainsi que le "propaganda" d'Edward Bernays.

Les érudits parmi les religieux pourront établir des passerelles avec leurs textes de référence (notamment en Europe, certains textes de la renaissance).

Source : http://www.philosopher.eu/others-writings/essay-on-wotan-w-nietzsche-c-g-jung/

Source originale  : WOTAN, Neue Schweizer Rundschau (Zurich). n.s., III (March, 1936),

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Essai sur Wotan
       

                   Par le Dr Carl Gustav Jung


Lorsque nous nous reportons à l'époque d'avant 1914, nous nous retrouvons à vivre dans un monde d'événements qui auraient été inconcevables avant la guerre. Nous commencions même à considérer la guerre entre nations civilisées comme une fable, pensant qu'une telle absurdité serait de moins en moins possible dans notre monde rationnel, organisé au niveau international. Et l'après-guerre a été un véritable sabbat de sorcières. Partout, des révolutions fantastiques, de violentes modifications de la carte, des retours en politique à des prototypes médiévaux ou même antiques, des États totalitaires qui engloutissent leurs voisins et surpassent toutes les théocraties précédentes dans leurs prétentions absolutistes, des persécutions de chrétiens et de juifs, des meurtres politiques à grande échelle, et enfin nous avons assisté à un raid pirate enjoué sur un peuple pacifique et à moitié civilisé.

Avec de tels événements dans le monde entier, il n'est pas surprenant qu'il y ait des manifestations tout aussi curieuses à plus petite échelle dans d'autres sphères. Dans le domaine de la philosophie, il faudra attendre un certain temps avant que l'on puisse évaluer le type d'époque que nous vivons. Mais dans le domaine de la religion, nous pouvons voir immédiatement que des choses très significatives se sont produites. Il n'y a pas lieu de s'étonner qu'en Russie, les splendeurs colorées de l'Église orthodoxe orientale aient été supplantées par le Mouvement des incroyants - en effet, on pousse soi-même un soupir de soulagement lorsqu'on sort de la brume d'une église orthodoxe avec sa multitude de lampes pour entrer dans une mosquée honnête, où l'omniprésence sublime et invisible de Dieu n'est pas évincée par un attirail sacré superflu. Aussi insipide et pitoyablement inintelligent que cela puisse être, et aussi déplorable que soit le faible niveau spirituel de la réaction "scientifique", il était inévitable que l'illumination "scientifique" du XIXe siècle se lève un jour en Russie.

Mais ce qui est plus que curieux - et même piquant jusqu'à un certain point - c'est qu'un ancien dieu de la tempête et de la frénésie, Wotan, longtemps calme, s'éveille, comme un volcan éteint, à une nouvelle activité, dans un pays civilisé que l'on croyait depuis longtemps avoir dépassé le Moyen Âge. Nous l'avons vu naître dans le mouvement de la jeunesse allemande, et dès le début, le sang de plusieurs moutons a été versé en l'honneur de sa résurrection. Armés d'un sac à dos et d'un luth, les jeunes gens blonds, et parfois aussi les jeunes filles, étaient vus comme des vagabonds agités sur toutes les routes, du Cap Nord à la Sicile, fidèles serviteurs du dieu errant. Plus tard, vers la fin de la République de Weimar, le rôle d'errant est repris par des milliers de chômeurs, que l'on rencontre partout dans leurs voyages sans but. En 1933, ils ne vagabondent plus, mais défilent par centaines de milliers. Le mouvement hitlérien a littéralement mis toute l'Allemagne debout, des enfants de cinq ans aux vétérans, et a donné le spectacle d'une nation migrant d'un endroit à l'autre. Wotan le vagabond est en mouvement. On pouvait l'apercevoir, l'air plutôt honteux, dans le lieu de réunion d'une secte de gens simples en Allemagne du Nord, déguisé en Christ assis sur un cheval blanc. Je ne sais pas si ces gens étaient conscients de l'ancienne connexion de Wotan avec les figures du Christ et de Dionysos, mais ce n'est pas très probable.


Wotan est un vagabond agité qui crée de l'agitation et suscite des conflits, ici et là, et fait de la magie. Le christianisme l'a rapidement transformé en diable, et il n'a survécu que dans des traditions locales déclinantes, sous la forme d'un chasseur de fantômes que l'on voyait avec sa suite, vacillant comme un feu follet dans la nuit orageuse. Au Moyen Âge, le rôle du vagabond agité a été repris par Ahasvérus, le Juif errant, qui n'est pas une légende juive mais chrétienne. Le motif du vagabond qui n'a pas accepté le Christ a été projeté sur les Juifs, de la même manière que nous redécouvrons toujours nos contenus psychiques inconscients chez d'autres personnes. En tout cas, la coïncidence de l'antisémitisme avec le réveil de Wotan est une subtilité psychologique qui mérite peut-être d'être mentionnée.

Les jeunes Allemands qui ont célébré le solstice par des sacrifices de moutons n'ont pas été les premiers à entendre le bruissement dans la forêt vierge de l'inconscient. Ils ont été anticipés par Nietzsche, Schuler, Stefan-George et Ludwig Klages. La tradition littéraire de la Rhénanie et des pays situés au sud du Main porte une empreinte classique dont il est difficile de se débarrasser ; toute interprétation de l'ivresse et de l'exubérance est susceptible d'être ramenée aux modèles classiques, à Dionysos, à la puer aeternus et à l'Eros cosmogonique. C'est le dieu de l'orage et de la frénésie, le déchaîneur de passions et la soif de la bataille ; en outre, c'est un magicien de haut niveau et un artiste de l'illusion qui est versé dans tous les secrets de nature occulte.

Le cas de Nietzsche est certainement particulier. Il n'avait aucune connaissance de la littérature germanique ; il a découvert le "Philistin culturel" ; et l'annonce que "Dieu est mort" a conduit à la rencontre de Zarathoustra avec un dieu inconnu sous une forme inattendue, qui l'a approché tantôt comme un ennemi, tantôt déguisé en Zarathoustra lui-même. Zarathoustra, lui aussi, était un devin, un magicien et le vent de la tempête :


Le cas de Nietzsche est certainement particulier. Il n'avait aucune connaissance de la littérature germanique ; il a découvert le "Philistin culturel" ; et l'annonce que "Dieu est mort" a conduit à la rencontre de Zarathoustra avec un dieu inconnu sous une forme inattendue, qui l'a approché tantôt comme un ennemi, tantôt déguisé en Zarathoustra lui-même. Zarathoustra, lui aussi, était un devin, un magicien et le vent de la tempête :

 

Et comme un vent, je viendrai souffler au milieu d'eux, et par mon esprit j'emporterai le souffle de leur esprit ; ainsi s'assiéra mon avenir. En vérité, Zarathoustra est un vent fort pour tous ceux qui sont bas ; et ce conseil, il le donne à ses ennemis et à tous ceux qui crachent et crachent : "Gardez-vous de cracher contre le vent".

Et lorsque Zarathoustra rêvait qu'il était le gardien des tombes dans la "forteresse solitaire de la mort" et qu'il s'efforçait d'en ouvrir les portes, soudain

 Un vent rugissant a déchiré les portes ; en sifflant, en hurlant et en gémissant, il a jeté devant moi un cercueil noir. Et au milieu des rugissements, des sifflements et des cris, le cercueil s'ouvrit et fit jaillir mille éclats de rire.

Le disciple qui a interprété le rêve a dit à Zarathoustra :

N'es-tu pas toi-même le vent au sifflement strident, qui fait éclater les portes de la forteresse de la mort ? N'es-tu pas toi-même le cercueil rempli de la malice gaie de la vie et de la grimace des anges ?

 

En 1863 ou 1864, dans son poème AU DIEU INCONNU, Nietzsche avait écrit :

 

    Je te reconnaîtrai et je te connaîtrai, Inconnu,

    qui fouille les profondeurs de mon âme,

    et qui souffle sur ma vie comme une tempête,

    Insaisissable, et pourtant mon frère !

    Je te connaîtrai et te servirai.

 

Vingt ans plus tard, dans sa CHANSON DU MISTRAL, il écrit :

 

    Mistral, chasseur de nuages,

    Tueur de ténèbres, balayeur des cieux,

    Vent de tempête furieux, comme je t'aime !

    Et nous ne sommes pas tous deux les premiers fruits

    Du même ventre, prédestinés pour toujours

    Au même destin ?

 

Dans le dithyrambe connu sous le nom de "Lamentation d'Ariane", Nietzsche est complètement la victime du dieu-chasseur :

 

    Étendu, frissonnant,

    comme une chose à moitié morte dont on réchauffe les pieds,

    secoué par des fièvres inconnues,

    frissonnant sous l'effet de flèches glacées et perçantes,

    chassé par toi, ô pensée,

    Ineffable ! Voilée, horrible !

    Toi, le chasseur derrière le nuage.

    Frappé par ta foudre,

    Toi, l'œil moqueur qui me fixe dans l'obscurité !

    Ainsi je gis.

    Me tordant, me tordant, me tourmentant.

    Avec toutes les tortures éternelles,

    Frappé

    Par toi, cruel chasseur,

    Toi, l'inconnu, Dieu !

 

Cette image remarquable du dieu-chasseur n'est pas une simple figure de style dithyrambique mais repose sur une expérience que Nietzsche a vécue à l'âge de quinze ans, à Pforta. Elle est décrite dans un livre de la sœur de Nietzsche, Elizabeth Foerster-Nietzsche. Alors qu'il se promenait la nuit dans un bois lugubre, il a été terrifié par un "cri à glacer le sang provenant d'un asile d'aliénés voisin", et peu après il s'est retrouvé face à face avec un chasseur dont "les traits étaient sauvages et étranges". Portant son sifflet à ses lèvres "dans une vallée entourée de broussailles sauvages", le chasseur "souffle d'une manière si stridente" que Nietzsche perd connaissance - mais se réveille à Pforta. C'était un cauchemar. Il est significatif que dans son rêve, Nietzsche, qui avait en réalité l'intention d'aller à Eisleben, la ville de Luther, ait discuté avec le chasseur de la question d'aller plutôt à "Teutschenthal" (la vallée des Allemands). Quiconque a des oreilles ne peut se méprendre sur le sifflement strident du dieu de l'orage dans la forêt nocturne.


Est-ce vraiment le philologue classique de Nietzsche qui a fait que le dieu s'appelle Dionysos au lieu de Wotan - ou peut-être est-ce dû à sa rencontre fatidique avec Wagner ?

Dans son REICH OHNE RAUM, publié pour la première fois en 1919, Bruno Goetz a perçu le secret des événements à venir en Allemagne sous la forme d'une vision très étrange. Je n'ai jamais oublié ce petit livre, car il m'a frappé à l'époque comme une prévision du temps allemand. Il anticipe le conflit entre le royaume des idées et la vie, entre la double nature de Wotan, dieu de la tempête et dieu des songes secrets. Wotan a disparu lorsque ses chênes sont tombés et est réapparu lorsque le Dieu chrétien s'est révélé trop faible pour sauver la chrétienté d'un massacre fratricide. Lorsque le Saint-Père de Rome ne pouvait que se lamenter impuissant devant Dieu sur le sort du grex segregatus, le vieux chasseur borgne, à l'orée de la forêt allemande, riait et sellait Sleipnir.


 

Nous sommes toujours convaincus que le monde moderne est un monde raisonnable, en nous basant sur des facteurs économiques, politiques et psychologiques. Mais si nous oublions un instant que nous vivons en l'an de grâce 1936, et si, mettant de côté notre rationalité bien intentionnée et trop humaine, nous imputons à Dieu ou aux dieux la responsabilité des événements contemporains plutôt qu'à l'homme, nous trouverons Wotan tout à fait approprié comme hypothèse occasionnelle. En fait, j'ose suggérer de façon hérétique que les profondeurs insondables du caractère de Wotan expliquent davantage le national-socialisme que les trois facteurs raisonnables réunis. Il n'y a aucun doute que chacun de ces facteurs explique un aspect important de ce qui se passe en Allemagne, mais Wotan en explique encore plus. Il est particulièrement éclairant en ce qui concerne un phénomène général qui est si étrange pour quiconque n'est pas allemand qu'il reste incompréhensible, même après la plus profonde réflexion.

 

Nous pourrions peut-être résumer ce phénomène général par le terme Ergriffenheit - un état de saisie ou de possession. Le terme postule non seulement un Ergriffener (celui qui est saisi) mais aussi un Ergreifer (celui qui saisit). Wotan est un Ergreifer des hommes, et, à moins de vouloir déifier Hitler - ce qui s'est effectivement produit - il est vraiment la seule explication. Il est vrai que Wotan partage cette qualité avec son cousin Dionysos, mais Dionysos semble avoir exercé son influence principalement sur les femmes. Les maenades étaient une espèce de femmes "milice de choc" et, selon les rapports mythiques, elles étaient assez dangereuses. Wotan se limita aux berserkers, qui trouvèrent leur vocation comme "chemises noires" des rois mythiques.

 

Un esprit encore enfantin pense aux dieux comme à des entités métaphysiques existant de plein droit, ou bien les considère comme des inventions ludiques ou superstitieuses. De l'un ou l'autre point de vue, le parallèle entre Wotan redivivivus et la tempête sociale, politique et psychique qui secoue l'Allemagne pourrait avoir au moins la valeur d'une parabole. Mais puisque les dieux sont sans aucun doute des personnifications de forces psychiques, affirmer leur existence métaphysique est autant une présomption intellectuelle que l'opinion selon laquelle ils pourraient jamais être inventés. Non pas que les "forces psychiques" aient quoi que ce soit à voir avec la conscience, car nous aimons jouer avec l'idée que conscience et psyché sont identiques. Ce n'est là qu'un autre morceau de présomption intellectuelle. Les "forces psychiques" ont bien plus à voir avec le domaine de l'inconscient. Notre manie des explications rationnelles trouve évidemment ses racines dans notre peur de la métaphysique, car les deux ont toujours été des frères hostiles. Ainsi, tout ce qui nous arrive d'inattendu depuis le royaume des ténèbres est considéré soit comme venant de l'extérieur et donc comme réel, soit comme une hallucination et donc comme faux. L'idée qu'il puisse y avoir quelque chose de réel ou de vrai qui ne vienne pas de l'extérieur a à peine commencé à poindre dans l'esprit de l'homme contemporain.


 

Pour une meilleure compréhension et pour éviter les préjugés, nous pourrions bien sûr nous passer du nom de "Wotan" et parler plutôt de la furor teutonicus. Mais nous ne ferions que dire la même chose et pas aussi bien, car la furor dans ce cas est une simple psychologisation de Wotan et ne nous dit rien d'autre que les Allemands sont dans un état de "fureur". Nous perdons ainsi de vue la caractéristique la plus particulière de tout ce phénomène, à savoir l'aspect dramatique de l'Ergreifer et de l'Ergriffener. Ce qui est impressionnant dans le phénomène allemand, c'est qu'un seul homme, manifestement "possédé", a contaminé toute une nation à tel point que tout s'est mis en branle et a commencé à rouler vers la perdition.

 

Il me semble que Wotan fait mouche en tant qu'hypothèse. Apparemment, il était seulement endormi dans la montagne de Kyffhauser que lorsque les corbeaux l'ont appelé pour annoncer le lever du jour. Il est un attribut fondamental de la psyché allemande, un facteur psychique irrationnel qui agit sur la haute pression de la civilisation comme un cyclone et la souffle. Malgré leur mauvaise humeur, les adorateurs de Wotan semblent avoir jugé les choses plus correctement que les adorateurs de la raison. Apparemment, tout le monde avait oublié que Wotan est une donnée germanique de première importance, l'expression la plus vraie et la personnification inégalée d'une qualité fondamentale particulièrement caractéristique des Allemands. Houston Stewart Chamberlain est un symptôme qui éveille le soupçon que d'autres dieux voilés dorment peut-être ailleurs. L'accent mis sur la race germanique - communément appelée "aryenne" - l'héritage germanique, le sang et le sol, les chants Wagalaweia, la chevauchée des Valkyries, Jésus en tant que héros blond aux yeux bleus, la mère grecque de saint Paul, le diable en tant qu'Alberich international sous une apparence juive ou maçonnique, l'aurore boréale nordique en tant que lumière de la civilisation, les races méditerranéennes inférieures - tout cela constitue le décor indispensable au drame qui se joue et, au fond, cela signifie la même chose : un dieu a pris possession des Allemands et leur maison est remplie d'un "puissant vent impétueux". " C'est peu après la prise de pouvoir d'Hitler, si je ne m'abuse, qu'est parue dans PUNCH une caricature d'un berserker enragé s'arrachant à ses liens. Un ouragan s'est déchaîné en Allemagne alors que nous croyons encore que c'est le beau temps.

 

Les choses sont relativement calmes en Suisse, bien qu'il y ait de temps en temps un souffle de vent venant du nord ou du sud. Parfois, il a un son légèrement inquiétant, parfois il murmure de manière si inoffensive ou même idéaliste que personne ne s'inquiète. Nous nous accommodons assez bien de cette sagesse proverbiale : "ne pas réveiller le chien qui dort". On dit parfois que les Suisses ont une aversion particulière pour les problèmes. Je dois réfuter cette accusation : les Suisses ont leurs problèmes, mais ils ne l'admettraient pour rien au monde, même s'ils voient bien dans quel sens souffle le vent. Nous prenons ainsi en compte la période de tempête et de stress en Allemagne, mais nous n'en parlons jamais, ce qui nous permet de nous sentir largement supérieurs.

Ce sont surtout les Allemands qui ont l'occasion, peut-être unique dans l'histoire, de regarder dans leur propre cœur et d'apprendre quels étaient ces périls de l'âme dont le christianisme a essayé de sauver l'humanité. L'Allemagne est un pays de catastrophes spirituelles, où la nature ne fait jamais plus qu'un semblant de paix avec la raison qui domine le monde. Le perturbateur de la paix est un vent qui souffle en Europe depuis l'immensité de l'Asie, balayant un large front de la Thrace à la Baltique, dispersant les nations devant lui comme des feuilles sèches. ou inspirant des pensées qui ébranlent le monde jusque dans ses fondements. C'est un Dionysos élémentaire qui fait irruption dans l'ordre apollinien. L'agitateur de cette tempête s'appelle Wotan, et nous pouvons en apprendre beaucoup sur lui à partir de la confusion politique et des bouleversements spirituels qu'il a provoqués à travers l'histoire.

Pour une étude plus précise de son caractère, il faut cependant remonter à l'époque des mythes, qui n'expliquaient pas tout par l'homme et ses capacités limitées, mais cherchaient la cause profonde dans la psyché et ses pouvoirs autonomes. Les premières intuitions de l'homme personnifiaient ces pouvoirs. Les intuitions les plus anciennes de l'homme personnifiaient ces puissances sous forme de dieux et les décrivaient dans les mythes avec beaucoup de soin et de circonstance, en fonction de leurs différents caractères, ce qui était d'autant plus facile que des types ou des images primordiaux solidement établis étaient innés dans l'inconscient de nombreuses races et exerçaient une influence directe sur elles. Parce que le comportement d'une race prend son caractère spécifique à partir de ses images sous-jacentes, nous pouvons parler d'un archétype "Wotan". En tant que facteur psychique autonome, Wotan produit des effets dans la vie collective d'un peuple et révèle ainsi sa propre nature, car Wotan possède une biologie propre, tout à fait distincte de celle de l'homme. Ce n'est que de temps en temps que les individus tombent sous l'influence irrésistible de ce facteur inconscient. Lorsqu'il est apaisé, on n'est pas plus conscient de l'archétype Wotan que d'une épilepsie latente.

Les Allemands adultes de 1914 pouvaient-ils prévoir ce qu'ils seraient aujourd'hui ? Ces transformations étonnantes sont l'effet du dieu du vent, qui "souffle où il veut, et tu en entends le bruit, mais tu ne peux pas dire d'où il vient, ni où il va". Il saisit tout sur son passage et renverse tout ce qui n'est pas solidement enraciné. Quand le vent souffle, il secoue tout ce qui n'est pas sûr, que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur.

 

Martin Ninck a récemment publié une monographie qui constitue un apport  bienvenu à notre connaissance de la nature de Wotan. Le lecteur ne doit pas craindre que ce livre ne soit qu'une étude scientifique écrite avec une distance académique par rapport au sujet. Certes, le droit à l'objectivité scientifique est pleinement préservé, et le matériel a été recueilli avec une extraordinaire minutie et présenté sous une forme exceptionnellement claire. Mais, au-delà de tout cela, on sent que l'auteur s'y intéresse de près, que la corde de Wotan vibre en lui aussi. Ce n'est pas une critique - au contraire, c'est l'un des principaux mérites du livre qui, sans cet enthousiasme, aurait pu facilement dégénérer en un catalogue fastidieux. Ninck esquisse un portrait vraiment magnifique de l'archétype allemand Wotan. Il le décrit en dix chapitres, en utilisant toutes les sources disponibles, comme le berserker, le dieu de la tempête, le vagabond, le guerrier, le dieu Wunsch et Minne, le seigneur des morts et des Einherjar, le maître du savoir secret, le magicien et le dieu des poètes. Les Valkyries et les Fylgja ne sont pas oubliées, car elles font partie de l'arrière-plan mythologique et du destin de Wotan. L'enquête de Ninck sur le nom et son origine est particulièrement instructive. Il montre que Wotan n'est pas seulement un dieu de la rage et de la frénésie qui incarne l'aspect instinctif et émotionnel de l'inconscient. Son côté intuitif et inspirateur se manifeste aussi en lui, car il comprend les runes et peut interpréter le destin.

 
Les Romains identifiaient Wotan à Mercure, mais son caractère ne correspond vraiment à aucun dieu romain ou grec, bien qu'il y ait certaines ressemblances. Il est un vagabond comme Mercure, par exemple, il règne sur les morts comme Pluton et Kronos, et il est lié à Dionysos par sa frénésie émotionnelle, particulièrement dans son aspect mantique. Il est surprenant que Ninck ne mentionne pas Hermès, le dieu de la révélation, qui, comme "pneuma" et "nous", est associé au vent. Il serait le lien avec le pneuma chrétien et le miracle de la Pentecôte. En tant que Poimandres (le berger des hommes), Hermès est un Ergreifer comme Wotan. Ninck fait remarquer à juste titre que Dionysos et les autres dieux grecs sont toujours restés sous l'autorité suprême de Zeus, ce qui indique une différence fondamentale entre le tempérament grec et le tempérament germanique. Ninck suppose une affinité intérieure entre Wotan et Kronus, et la défaite de ce dernier est peut-être le signe que l'archétype de Wotan a été un jour dépassé et divisé à l'époque préhistorique. En tout état de cause, le dieu germanique représente une totalité à un niveau très primitif, une condition psychologique dans laquelle la volonté de l'homme était presque identique à celle du dieu et entièrement à sa merci. Mais les Grecs avaient des dieux qui aidaient l'homme contre d'autres dieux ; d'ailleurs, le Tout-Père Zeus lui-même n'est pas loin de l'idéal d'un despote bienveillant et éclairé.

 

Il n'était pas dans la nature de Wotan de s'attarder et de montrer des signes de vieillesse. Il a simplement disparu lorsque les temps se sont retournés contre lui, et est resté invisible pendant plus de mille ans, travaillant de manière anonyme et indirecte.
Les archétypes sont comme les lits de rivières qui s'assèchent lorsque l'eau les déserte, mais qu'elle peut retrouver à tout moment. Un archétype est comme un vieux cours d'eau le long duquel l'eau de la vie a coulé pendant des siècles, creusant un canal profond pour elle-même. Plus longtemps elle a coulé dans ce canal, plus il est probable que, tôt ou tard, l'eau retournera dans son ancien lit.

La vie de l'individu en tant que membre de la société et particulièrement en tant que partie de l'État peut être régulée comme un canal, mais la vie des nations est un grand fleuve impétueux qui échappe totalement au contrôle humain, entre les mains de Celui qui a toujours été plus fort que les hommes. La Société des Nations, qui était censée posséder une autorité supranationale, est considérée par certains comme un enfant qui a besoin de soins et de protection, par d'autres comme un avortement. Ainsi, la vie des nations se déroule sans contrôle, sans guide, sans savoir où elle va, comme un rocher dévalant le flanc d'une colline, jusqu'à ce qu'elle soit arrêtée par un obstacle plus fort qu'elle. Les événements politiques se déplacent d'une impasse à l'autre, comme un torrent pris dans des ravins, des criques et des marais. Tout contrôle humain prend fin lorsque l'individu est pris dans un mouvement de masse. C'est alors que les archétypes commencent à fonctionner, comme cela se produit également dans la vie des individus lorsqu'ils sont confrontés à des situations qui ne peuvent être traitées par aucun des moyens habituels. Mais ce qu'un soi-disant Führer fait avec un mouvement de masse peut être vu clairement si nous tournons nos yeux vers le nord ou le sud de notre pays.

L'archétype du dirigeant ne reste pas éternellement le même, comme le montrent les limites temporelles imposées au règne de paix espéré, le "Reich de mille ans". L'archétype méditerranéen du souverain juste, aimant l'ordre et bienveillant a été brisé dans toute l'Europe du Nord, comme en témoigne le sort actuel des Églises chrétiennes. Le fascisme en Italie et la guerre civile en Espagne montrent qu'au sud aussi, le cataclysme a été bien plus grand que prévu. Même l'Église catholique ne peut plus se permettre des épreuves de force.

Le Dieu nationaliste a attaqué le christianisme sur le front étranger. En Russie, il s'appelle technologie et science, en Italie, Duce, et en Allemagne, "foi allemande", "christianisme allemand" ou État. Les "chrétiens allemands" sont une contradiction dans les termes et feraient mieux de rejoindre le "Mouvement de la foi allemande" de Hauer. Ce sont des personnes décentes et bien intentionnées qui reconnaissent honnêtement leur Ergriffenheit et essaient de s'accommoder de ce fait nouveau et indéniable. Ils se donnent beaucoup de mal pour rendre la situation moins alarmante, en l'habillant d'un vêtement historique conciliant et en nous donnant des aperçus consolants de grands personnages tels que Maitre Eckhart, qui était lui aussi allemand et lui aussi ergriffen. De cette façon, la question embarrassante de savoir qui est l'Ergreifer est contournée. Il a toujours été "Dieu". Mais plus Hauer restreint la sphère mondiale de la culture indo-européenne aux "nordiques" en général et à l'Edda en particulier, et plus cette foi devient "allemande" en tant que manifestation de l'Ergriffenheit, plus il est douloureusement évident que le dieu "allemand" est le dieu des Allemands.

On ne peut pas lire le livre de Hauer sans émotion, si on le considère comme l'effort tragique et vraiment héroïque d'un savant consciencieux qui, sans savoir comment cela lui est arrivé, a été violemment convoqué par la voix inaudible de l'Ergreifer et essaie maintenant de toutes ses forces, et avec tout son savoir et sa capacité, de jeter un pont entre les forces obscures de la vie et le monde brillant des idées historiques. Mais que signifient toutes les beautés du passé, issues de niveaux de culture totalement différents, pour l'homme d'aujourd'hui, confronté à un dieu tribal vivant et insondable tel qu'il n'en a jamais connu ? Elles sont aspirées comme des feuilles sèches dans le tourbillon rugissant, et les allitérations rythmiques de l'Edda se mêlent inextricablement aux textes mystiques chrétiens, à la poésie allemande et à la sagesse des Upanishads. Hauer lui-même est ergriffé par la profondeur de sens des mots primitifs qui se trouvent à la racine des langues germaniques, à un point qu'il n'avait certainement jamais connu auparavant. Ce n'est pas la faute de l'indologue Hauer, ni de l'Edda, mais celle du kairos - le moment présent dans le temps - dont le nom s'avère être Wotan. Je conseillerais donc au Mouvement de la foi allemand de mettre de côté ses scrupules. Des personnes intelligentes qui ne les confondront pas avec les grossiers adorateurs de Wotan dont la foi n'est qu'un faux-semblant. Il y a des gens dans le Mouvement de la Foi allemande qui sont assez intelligents non seulement pour croire, mais pour savoir, que le dieu des Allemands est Wotan et non le Dieu chrétien.

C'est une expérience tragique et ce n'est pas une honte.

Il a toujours été terrible de tomber entre les mains d'un dieu vivant. Yahvé n'a pas fait exception à cette règle, et les Philistins, les Edomites, les Amorites et les autres, qui étaient en dehors de l'expérience de Yahvé, ont certainement dû la trouver extrêmement désagréable. L'expérience sémitique d'Allah a été pendant longtemps une affaire extrêmement pénible pour l'ensemble de la chrétienté. Nous qui sommes à l'extérieur, nous jugeons beaucoup trop les Allemands, comme s'ils étaient des agents responsables, mais peut-être serait-il plus juste de les considérer aussi comme des victimes.

Si nous appliquons de manière cohérente ce point de vue, certes particulier, nous sommes amenés à conclure que Wotan doit, avec le temps, révéler non seulement le côté agité, violent, orageux de son caractère, mais aussi ses qualités extatiques et mantiques - un aspect très différent de sa nature. Si cette conclusion est correcte, le national-socialisme ne serait pas le dernier mot. Des choses doivent être cachées en arrière-plan, que nous ne pouvons pas imaginer pour le moment, mais nous pouvons nous attendre à ce qu'elles apparaissent au cours des prochaines années ou décennies.Le réveil de Wotan est un retour dans le passé ; le ruisseau a été endigué et a repris son ancien cours. Mais l'Obstruction ne durera pas éternellement ; il s'agit plutôt d'un reculer pour mieux sauter, et l'eau franchira l'obstacle. Alors, enfin, nous saurons ce que Wotan dit quand il "murmure avec la tête de Mimir".

 

    Déplacez rapidement les fils de Mimir, et le destin

    est entendu dans la note du Gjallarhorn ;

    Heimdall souffle fort, la corne est en l'air,

    Tous ceux qui sont sur les routes de l'enfer tremblent de peur.

    Yggdrasill tremble et frissonne dans les hauteurs

    Les membres anciens, et le géant est libre ;

    Wotan murmure avec la tête de Mimir.

    Mais le parent de Surt le tuera bientôt.

    Comment se portent les dieux ? Comment se portent les elfes ?

    Tout Jotunheim gémit, les dieux sont en conseil ;

    Les nains rugissent bruyamment aux portes de pierre,

    Les maîtres des rochers : voulez-vous en savoir plus ?

    Maintenant Garm hurle fort devant Gnipahellir ;

    Les entraves vont éclater, et le loup va courir librement ;

    J'en sais beaucoup, et j'en vois encore plus

    Sur le sort des dieux, les puissants au combat.

    De l'est vient Hrym avec son bouclier tenu haut ;

    Le serpent se tord dans une colère géante ;

    Sur les vagues il se tortille, et l'aigle fauve

    Ronge les cadavres en hurlant ; Naglfar est libre.

    Sur la mer du nord navigue un navire

    Avec les gens de Hel, à la barre se tient Loki ;

    Après le loup, des hommes sauvages suivent,

    Et avec eux le frère de Byleist va.

 

Traduction SombreVert et DeepL

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Publié le 11 Juillet 2021

La métaphysique du sexe

Une traduction du texte de John Michael Greer avec son aimable autorisation.

Le mois dernier, lorsque j'ai réalisé qu'il y aurait cinq mercredis et que je n'avais rien sur la liste pour le cinquième, j'ai dépoussiéré une vieille habitude et demandé à mes lecteurs ce qu'ils voulaient voir traité. Cela a donné lieu à des discussions très animées.  Le plus grand nombre de personnes ayant exprimé une préférence souhaitait une mise à jour sur la longue descente - l'effondrement de la civilisation industrielle, qui a commencé pour de bon au début des années 1970 et se poursuivra bien après la mort de tous les lecteurs de ce blog - et c'était donc le thème du billet de la semaine dernière. Plusieurs autres sujets ont suscité beaucoup d'intérêt, cependant, et j'ai donc décidé de réduire mes articles sur l'histoire magique de l'Amérique à un par mois, et d'utiliser le créneau ainsi libéré pour couvrir certains des autres sujets demandés.

L'un de ces sujets était ce que la philosophie occulte a à dire sur la masturbation et la pornographie. Cela ne m'a pas du tout surpris.  De nos jours, la plupart des Américains ont grandi dans un environnement médiatique saturé d'images sexuelles explicites, et dans une culture de l'élite qui célèbre toutes les formes de sexualité impliquant des adultes consentants, à l'exception de l'hétérosexualité masculine, qu'elle stigmatise.  Les jeunes hétérosexuels qui ne peuvent ou ne veulent pas se frayer un chemin à travers les doubles-contraintes de plus en plus byzantines auxquelles ils sont confrontés s'ils poursuivent des relations avec des femmes se tournent souvent vers la masturbation et la pornographie. Un grand nombre d'entre eux sont mal à l'aise avec cette habitude, et c'est pourquoi j'ai eu un flux constant de jeunes hommes qui se sont présentés à mes séances de questions-réponses du lundi "magie", voulant savoir ce qu'un occultiste à l'ancienne pouvait dire sur le sujet.

Il se trouve que l'occultisme à l'ancienne a pas mal de choses à dire sur ces sujets. Pour donner un sens à la métaphysique du sexe, il sera nécessaire de couvrir certaines des idées de base de la philosophie occulte, et la meilleure façon de commencer est de prêter attention à ce que nous, les êtres humains, expérimentons réellement, et comment nous l'expérimentons.

Commençons par la catégorie la moins controversée, les choses que nous expérimentons avec nos cinq sens - la vue, l'ouïe, le toucher, le goût et l'odorat - et avec des instruments conçus pour étendre la portée d'un ou plusieurs de ces sens.  En un sens, c'est l'univers de la matière et de l'énergie que les scientifiques étudient.  Je dis "en un sens" parce que les philosophes ont souligné que ce n'est pas si simple ; tout ce que nous expérimentons est, en tant qu'expérience, une image dans la conscience, et son lien avec la réalité "extérieure" est tout sauf direct.  Pour l'instant, cependant, nous pouvons mettre ces questions de côté et considérer les choses que nous expérimentons avec nos cinq sens comme des choses matérielles.

Ce n'est pas le seul type de choses que nous expérimentons, bien sûr. Une autre catégorie consiste en des choses qui ressemblent à des expériences sensorielles mais qui ne passent pas par les sens. La mémoire et l'imagination en sont de bons exemples.  Prenez un moment pour vous souvenir de quelqu'un que vous connaissez bien. Vous pouvez "voir" des images du visage de cette personne, "entendre" sa voix, "sentir" la qualité particulière d'une étreinte ou d'une poignée de main, voire même "sentir" un parfum ou un après-rasage familier.  De même, vous pouvez imaginer un personnage dans un roman et, si l'auteur est bon, vous vivrez certaines des mêmes expériences quasi-sensorielles liées à ce personnage. Si vous prêtez attention à vos pensées, vous découvrirez que la plupart, voire la totalité, de vos pensées sont constituées de ce type d'expériences : des images, des mots ou autres, qui ressemblent à des expériences sensorielles mais n'impliquent pas les sens.

Ce sont les deux catégories d'expériences auxquelles la plupart d'entre nous sont prêts à penser. Il existe cependant deux autres catégories d'expériences humaines, et nous devons également les inclure dans le tableau. La première est un ensemble d'expériences que notre culture a rendu tabou, même si tout le monde en fait l'expérience : les expériences de la force vitale. Chacun sait ce que c'est que de ressentir les "vibrations" d'une personne ou d'un lieu, de se sentir vitalisé par certains endroits, personnes et choses, et dévitalisé par d'autres. C'est normal, et la plupart des cultures du monde entier et de l'histoire ont des façons directes d'en parler.  Ce n'est que dans les cultures de l'Occident industriel moderne qu'ils ont été stigmatisés comme des choses qui n'existent pas, ne peuvent pas et ne doivent pas exister.

La quatrième catégorie est encore plus subtile.  Avez-vous déjà fait l'expérience d'apprendre un mot inconnu par le son ou l'orthographe, puis de découvrir plus tard ce qu'il signifie ?  Si vous ne connaissez pas l'allemand, par exemple, le mot Backpfeifengesicht ne vous dira rien, mais vous pouvez apprendre à le prononcer et à l'épeler, et même à le mémoriser.  Si je vous explique ensuite qu'il signifie "un visage qui ne demande qu'à être giflé", quelque chose d'autre entre en jeu.  Vous pouvez sans doute penser à des gens qui ont un visage comme celui-là - je le peux certainement - et ce qui n'était qu'un simple son devient une forme qui unit de nombreuses expériences dans un modèle commun de signification.

Pour le matérialiste moderne, la première catégorie que j'ai décrite - le monde matériel - est le monde réel, et les trois autres sont considérées comme "mentales" et donc pas tout à fait réelles.  Pour l'occultiste, en revanche, chacune de ces catégories appartient à son propre type de réalité. Le terme habituel de nos jours est "plan".  Le monde de la matière et de l'énergie que les scientifiques étudient est le plan matériel.  Le monde de la force vitale, des vibrations, des pressentiments et de bien d'autres expériences dont on nous apprend à ne pas parler, fait partie du plan éthérique.  Le monde des images quasi-sensorielles qui ne passent pas par les sens, comme les pensées, les rêves et les imaginations, fait partie du plan astral. (On l'appelle ainsi parce que c'est le plan à travers lequel fonctionnent les forces suivies par l'astrologie).  Le monde des significations, des formes qui unissent des expériences séparées en modèles, est une première perception faible du plan mental.

Existe-t-il d'autres plans ?  Bien sûr, mais ce sont les quatre que les êtres humains sont capables d'expérimenter directement à ce stade de notre évolution. Les plans plus élevés sont parfois regroupés sous le nom de plan spirituel, parfois discutés individuellement - la taxonomie que j'utilise ces jours-ci, par exemple, identifie trois plans au-dessus du plan mental, et les appelle le plan spirituel, le plan causal et le plan divin. (Causal, soit dit en passant, n'est pas le même mot que casuel ("lié au hasard" NDT) !  Le plan causal est le plan des causes).  Ces plans supérieurs ne sont cependant pas pertinents pour notre sujet actuel, nous pouvons donc les laisser de côté pour le moment.

Nous avons donc quatre plans que les êtres humains perçoivent actuellement. Nous avons également un corps sur chacun de ces plans. Votre corps matériel est la structure familière de viande, d'os et de fluides assortis par laquelle vous interagissez avec le monde matériel.  Votre corps éthérique est votre corps de force vitale - sa forme est presque identique à celle de votre corps matériel, mais il s'étend de quelques centimètres de plus vers l'extérieur, dans toutes les directions.  Votre corps astral est une région ovoïde qui interpénètre vos corps matériel et éthérique et qui s'étend dans toutes les directions au-delà de ceux-ci.  Votre corps mental - techniquement, votre gaine mentale, car nous sommes encore en train de faire évoluer les corps mentaux - est une vague présence incertaine à l'intérieur du corps astral, dont la taille et la complexité varient d'une personne à l'autre.

C'est ici que nous commençons à nous rapprocher du sexe, car chacun de ces corps a son propre genre. Une des raisons pour lesquelles les occultistes ont tendance à lever les yeux au ciel lors du récent battage médiatique sur les questions de transgenre est que presque toutes les personnes impliquées dans ce battage semblent penser que chaque personne n'a qu'un seul genre.  Ce n'est pas le cas. Le sexe de votre corps matériel peut être déterminé en regardant dans votre caleçon. Le sexe de votre corps éthérique, de votre corps astral et de votre enveloppe mentale n'est pas aussi évident. Normalement, votre corps astral est du même sexe que votre corps physique, et votre corps éthérique et votre gaine mentale sont du sexe opposé - mais "normalement" est une étiquette qui permet une grande variation individuelle ; il y a des gens dont les corps subtils sont de sexe différent.

Parlons un peu de ce que signifie le "genre" dans ce sens. Il peut être compris tout simplement comme la direction de l'énergie créatrice.  Sur le plan matériel, c'est assez facile à voir : l'homme crée sur ce plan, c'est-à-dire qu'il procrée, par le mouvement d'éjaculation vers l'extérieur ; la femme, sur ce même plan, procrée par un mouvement vers l'intérieur, en acceptant le sperme, en le combinant avec son propre ovule et en élevant l'enfant qui en résulte jusqu'à son terme. Il en va de même, mutatis mutandis, sur les autres plans.

Prenons l'exemple d'un homme avec la disposition habituelle des corps. Sur le plan purement matériel, le plan de la biologie, il est masculin.  Sur le plan éthérique, il est féminin et a besoin de recevoir de l'énergie vitale, de l'attirer en lui - d'où le sentiment de bien-être abondant que beaucoup d'hommes ressentent après l'amour, parce qu'ils reçoivent de leur partenaire une force éthérique au cours de l'acte. Sur le plan astral, là encore, l'homme est masculin, et il diffuse des images et des mots, en espérant qu'ils seront reçus. (Selon le sexe astral de l'autre ou des autres personnes impliquées, cela peut être bien accueilli, ou être qualifié de "mansplaining").  Sur le plan mental, enfin, il est féminin, et a besoin de recevoir.  De nombreux écrivains et artistes masculins ont besoin de l'inspiration d'une femme pour créer - à tel point que c'est pratiquement un cliché.  Il est beaucoup plus rare qu'une femme écrivain ou artiste ait besoin d'une source d'inspiration masculine comparable.

Une femme avec la disposition habituelle des corps est tout le contraire. Elle est féminine sur le plan matériel, comme nous l'avons déjà expliqué. Elle est masculine sur le plan éthérique - si elle est en bonne santé physique et mentale, elle est une fontaine débordante de force vitale, qui peut être dirigée de diverses manières créatives ou (plus souvent dans notre société) engorgée jusqu'à ce qu'elle stagne. Elle est féminine sur le plan astral - ses pensées et ses sentiments sont facilement influencés par son environnement, d'où la réputation de sensibilité des femmes. Sur le plan mental, enfin, elle est masculine, et plus susceptible d'inspirer que d'avoir besoin d'inspiration. Mais là encore, les variations sont innombrables.  Il faut garder ces complexités à l'esprit lorsque nous abordons les dimensions occultes de la masturbation.

Commençons par la masturbation masculine, puisque les différences entre les sexes sont importantes ici et que presque toutes les personnes qui ont posé des questions sur ce sujet étaient de jeunes hommes.  Les organes sexuels que nous avons hérités de nos ancêtres animaux ont évolué dans le but d'avoir des rapports hétérosexuels, et ceci est aussi vrai pour les organes éthériques et astraux que pour les organes physiques.  Cela ne signifie pas que les autres modes de sexualité ne sont pas naturels - c'est une caractéristique commune de l'évolution que les organes qui ont évolué dans un but précis se révèlent être pré-adaptés à un autre but. (Vos mains ont évolué vers leur forme actuelle pour aider vos lointains ancêtres à grimper aux arbres, par exemple, et non pour fabriquer et utiliser des outils).  Lorsqu'un homme doté de la disposition habituelle des corps subtils s'engage dans une activité sexuelle quelconque, ces corps vont s'attendre à recevoir des stimuli similaires à ceux qu'ils recevraient en faisant l'amour avec une femme dotée d'une disposition correspondante de corps subtils. Dans la mesure où il ne les reçoit pas, des problèmes potentiels apparaissent. Ces problèmes ne sont pas insurmontables, mais il est utile d'en être conscient afin de pouvoir les contrer.

Sur le plan éthérique, la première difficulté à laquelle est confronté un jeune homme hétéro lorsqu'il se masturbe est que son corps éthérique s'attend à recevoir une décharge de force vitale du corps éthérique de son partenaire et qu'il ne l'obtient pas.  C'est la source de la faiblesse et de la dépression que beaucoup d'hommes ressentent après s'être masturbés. À long terme, cela peut entraîner des problèmes de santé et produire cette vibration distinctive que beaucoup d'entre nous ont appris à associer à des mots comme "branleur".

Heureusement, il existe d'autres sources d'énergie éthérique, et l'une des façons de résoudre ce problème est de s'en servir à la place.  Une respiration vigoureuse est l'un des moyens par lesquels le corps se charge en force éthérique, par exemple, et un exercice physique intense qui vous fait respirer profondément est donc un bon substitut. L'air frais et la lumière du soleil aident également votre corps à se recharger en force éthérique.  Une séance d'entraînement dans une salle de boxe suivie de quelques kilomètres de marche ou de course en plein air ?  Cela fera l'affaire.

L'eau froide a également beaucoup à offrir. L'eau absorbe et retient la substance éthérique plus efficacement que toute autre substance courante - c'est pourquoi les êtres vivants sont principalement constitués d'eau - mais la capacité éthérique d'un volume d'eau donné varie avec la température, atteignant son maximum à 4°C (39°F). En prenant une douche froide, vous vous baignez littéralement dans une substance éthérique en plus de l'eau, afin que votre corps éthérique puisse se recharger.  (Se laver avec un gant de toilette essoré à l'eau froide est presque aussi efficace et constitue un choc moindre pour votre système). Comme l'eau conserve sa capacité à absorber la substance éthérique, elle ramasse et emporte également les saletés éthériques de la surface de votre corps éthérique - oui, les plans intérieurs peuvent être tout aussi sales que le plan matériel, surtout dans une société comme la nôtre qui n'a même pas le concept d'hygiène éthérique et astrale.

Et si votre corps éthérique a la polarité opposée, comme c'est le cas chez la plupart des femmes et certains hommes ?  Votre corps éthérique s'attend à libérer une grande quantité de force dans le corps éthérique de votre partenaire, mais s'il n'y a pas de partenaire, cela ne peut pas se produire. Le résultat sera généralement un état de congestion éthérique. Il existe plusieurs façons de gérer ce problème, mais la plus fiable est l'activité créative.  Tout, de la musique à l'écriture en passant par la cuisine et les travaux ménagers, fait l'affaire, pour autant que les corps matériel et éthérique soient directement impliqués dans le processus créatif.  Si vous avez ce type de corps éthérique, le travail créatif est un exutoire utile, même si vous ne vous masturbez pas, car votre corps accumule plus de force éthérique qu'il n'en a besoin, et la créativité lui donne un endroit où aller.

Voilà pour le plan éthérique. Sur le plan astral, il existe des complexités supplémentaires. Un homme avec la disposition habituelle des corps est masculin sur le plan astral, et cela a un effet très distinctif en matière de sexualité. Un homme sexuellement excité projette une image astrale de désirabilité sur ses partenaires potentielles. C'est comme le phénomène bien connu des "lunettes de bière". Même sans alcool, la plupart des hommes ont fait l'expérience de trouver une femme tout à fait désirable la veille au soir et décidément peu attirante le lendemain matin ; c'est parce que sa désirabilité apparente a été projetée sur elle par son propre corps astral.

C'est là que la pornographie devient un problème. Pour l'homme qui se masturbe, la pornographie remplace une partenaire réelle comme cible pour cet acte de projection. Il y a cependant une boucle de rétroaction, car jusqu'à ce que vous atteigniez un certain niveau de développement intérieur, les images qui alimentent votre corps astral en matière première seront principalement tirées de choses que vous expérimentez avec vos sens. Les images utilisées dans la pornographie ont une dimension sexuelle artificiellement rehaussée par toutes les astuces connues des actrices, des photographes, des éditeurs d'images, des chirurgiens plasticiens, et j'en passe, de sorte qu'elles ont très peu de rapport avec le monde dans lequel nous vivons réellement.  Si vous passez beaucoup de temps à regarder de la pornographie, ces images seront ce que votre corps astral aura sous la main, et avec le temps, vous risquez de devenir de moins en moins capable de projeter la désirabilité sur autre chose. Cela rend les relations avec, disons, de vraies femmes encore plus difficiles qu'elles ne le seraient autrement. La morale de cette histoire est simple : si vous vous masturbez, utilisez votre propre imagination comme source d'images, plutôt que la pornographie.

Et l'autre polarité du corps astral, celle que l'on trouve chez la plupart des femmes et certains hommes ?  Si vous avez cette polarité, vous ne projetez pas votre désirabilité sur les autres, vous voulez être désiré.  C'est le secret des romans d'amour.  Pensez à l'intrigue de base de votre roman d'amour standard de mauvais goût : l'homme principal est fort, beau, dominant, puissant, mais il est tellement envahi par le désir de l'héroïne qu'il en fait le centre de sa vie. En d'autres termes, cela n'a pas plus à voir avec les relations réelles que la pornographie avec le sexe réel, et cela déforme les réponses émotionnelles des personnes ayant un corps astral féminin de la même manière que la pornographie déforme les réponses sexuelles des personnes ayant un corps astral masculin - dans les deux cas, indépendamment de leur sexe sur le plan matériel.  Dans les deux cas, se passer de la stimulation artificielle, qu'il s'agisse de masturbation physique ou émotionnelle, est une bonne idée.

Nous avons donc les conséquences éthériques de la masturbation, et les conséquences astrales. Il existe cependant une autre série de difficultés potentielles, qui découlent du fait que les plans intérieurs sont peuplés, et pas seulement d'êtres humains.  Pour comprendre cela, nous allons devoir aborder certains enseignements occultes sur les esprits, car c'est bien de cela qu'il s'agit : des êtres vivants et conscients qui n'ont pas de corps matériel.  Deux des nombreuses catégories d'esprits peuvent être impliquées dans les questions dont nous discutons.

Les premiers sont appelés larves. Les larves sont des entités éthériques de bas niveau, presque sans esprit, qui occupent le même créneau sur le plan éthérique que les charognards sur le plan matériel : elles mangent les corps éthériques des morts. Dans des circonstances normales, ils sont inoffensifs, mais dans une société qui n'a même pas le concept d'hygiène éthérique et astrale, ils peuvent être un problème.

Le problème est simplement que, étant presque sans esprit, s'ils trouvent quelque chose qui ressemble à un corps éthérique abandonné, ils s'y accrochent et essaient de s'en nourrir. Il peut s'agir, par exemple, du corps éthérique dévitalisé et malpropre d'un masturbateur masculin chronique qui vit et travaille dans un environnement éthériquement sale.  Le parasitisme par une larve se traduit généralement par une perte de vitalité lente et régulière, sans cause médicale.  Heureusement, il est facile à traiter une fois qu'il est reconnu : nettoyer son corps éthérique et son environnement est généralement suffisant. Dans les cas graves, prenez une lame de fer avec une poignée isolée et effectuez de petits mouvements de piqûre avec la pointe, en les dirigeant vers le corps du patient à une distance de deux ou trois pieds.  Les larves peuvent être assez petites, de la taille d'une paume humaine, et donc, à moins que vous n'ayez des capacités de clairvoyance et que vous puissiez voir la larve, vous devez faire cela tout autour du corps du patient, de la tête aux pieds, en espaçant chaque coup de quelques centimètres seulement des autres.


Voilà pour les larves. L'autre type d'esprit fonctionne sur le plan astral ; nous pouvons utiliser un terme traditionnel pour les désigner, et les appeler démons, mais il existe de nombreux types, classes et variétés d'êtres astraux malveillants. Pour des raisons qui leur sont propres, certains de ces êtres cherchent à entraîner les êtres humains dans divers schémas de pensée et d'action déséquilibrés et autodestructeurs. Ils n'ont aucun pouvoir réel sur nous, sauf dans la mesure où nous leur donnons du pouvoir, mais ils peuvent murmurer des pensées dans l'esprit des humains en situation de vulnérabilité, et si ces pensées sont accueillies, d'autres suivront. Chaque classe de démons a son déséquilibre caractéristique, et la sexualité déformée est au centre d'une de ces classes.  Oui, les masturbateurs chroniques qui regardent obsessionnellement de la pornographie sont vulnérables à de telles entités.

Les signes d'une implication démoniaque sont faciles à reconnaître.  Tout d'abord, ces entités ont quelque chose d'étrangement mécanique ; les personnes qu'elles influencent font et disent les mêmes choses encore et encore, selon des schémas rigoureusement stéréotypés, et perdent la capacité de réfléchir à leurs paroles et à leurs actions et de remarquer à quel point elles sont devenues bizarrement répétitives.  Deuxièmement, l'activité démoniaque a un ton émotionnel qui, une fois reconnu, n'est jamais oublié : chaud, enflammé, confus, excité, trouble.  Enfin, les actions qu'ils inspirent aux êtres humains sont toujours autodestructrices et autodestructives.

Comment se débarrasser de tels êtres ?  Encore une fois, ils n'ont aucun pouvoir réel sur nous à moins que nous ne le leur donnions, et il existe de nombreuses façons d'utiliser ce fait. La religion est l'une des deux options classiques : les anciennes dénominations religieuses sacramentelles de toutes les traditions ont des méthodes solides pour chasser ces êtres, bien que les versions modernistes plus édulcorées de ces mêmes traditions soient généralement aussi impuissantes qu'ignorantes de ces choses.  La magie est l'autre option classique : l'exécution quotidienne d'un rituel de bannissement tel que le Petit Rituel du Pentagramme ou la Sphère de Protection, ou l'utilisation d'autres méthodes de protection et de bénédiction, feront généralement le travail en peu de temps.  Bien sûr, vous pouvez combiner les deux.

Une mise en garde s'impose avant de terminer.  L'une des grandes erreurs des religions de l'ère des Poissons, l'ère de 2160 ans dont les vestiges s'estompent autour de nous en ce moment, a été l'habitude d'établir une notion arbitraire de ce que les êtres humains devraient être, et d'insister sur le fait que c'est la faute des mauvais esprits si nous ne vivons pas selon cette notion. Cette habitude a été particulièrement courante et contre-productive lorsqu'elle a été appliquée à la sexualité humaine. Insister de manière dogmatique sur le fait que les êtres humains sont naturellement chastes, hétérosexuels et monogames, et qu'ils ne s'écartent de cet idéal que parce que les démons les dérangent, est un excellent moyen de garantir que vos congrégations seront criblées de culpabilité et de névroses, mais cela ne va pas au dela.

Le désir sexuel humain est complexe, varié et robuste, et il n'entre pas dans un simple dogme arbitraire du type de ceux que les autoritaires religieux aiment brandir. Si vos désirs ne se conforment pas à un tel dogme, cela ne signifie pas qu'un démon vous fait quelque chose ; il se peut simplement que vous fassiez partie des nombreuses personnes pour lesquelles le dogme ne fonctionne tout simplement pas. Le contraire d'une mauvaise idée, comme je l'ai observé plus d'une fois dans ces essais, est normalement une autre mauvaise idée, et le célibat solitaire compulsif n'est pas plus sain que le vice solitaire compulsif. D'un point de vue occulte, chaque âme humaine est unique, avec des besoins et des possibilités au moins légèrement différents de ceux de toute autre âme, et notre tâche en tant qu'êtres humains est de trouver des moyens équilibrés et sains de répondre à ces besoins et d'exprimer ces possibilités sans interférer avec les droits et les besoins des autres : dans un contexte sexuel, et dans le reste de la vie.

Traduction DeepL, Lombre et SombreVert

 

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Publié le 20 Novembre 2020

Une traduction du texte de John Michael Greer avec son aimable autorisation.

 

À la fin de notre dernière exploration de l'histoire magique de l'Amérique, il y a deux mois, la jeune société théosophique avait apparemment rendu son dernier soupir.  Sa première branche à New York avait cessé de se réunir, la poignée de loges autre part se débattait, et ses deux membres les plus importants et les plus compétents - Emma Hardinge Britten et Helena Petrovna Blavatsky- avaient tous deux quitté les États-Unis pour les coins les plus reculés du monde. Selon toute apparence, l'espoir d'une organisation publique enseignant la philosophie occulte au grand jour dans le monde occidental s'était évanoui dans le royaume des puissants.

Helena Petrovna Blavatsky

Helena Petrovna Blavatsky

Deux facteurs ont cependant milité contre sa disparition. Le premier était le formidable talent de Blavatsky en tant qu'auteur, organisateur et impresario occulte.  Une fois installée  avec Henry Steel Olcott, à Chennai, en Inde,en 1879, elle ne perdit pas de temps.  Des lettres furent envoyées à New York et à la poignée d'autres groupes locaux que la Société initiale avait fondés, annonçant que la Société était toujours en activité et commençant le travail de réorganisation. Peu de temps après, les indices d'un nouveau corps de doctrine extraordinaire commencèrent à se répandre dans les interstices de la scène occulte de tout le monde occidental.

Koot Hoomi (imaginé par un théosophe artiste)

Koot Hoomi (imaginé par un théosophe artiste)

Les choses ont atteint leur point d'ébullition lorsque deux membres anglais de la Société, A.P. Sinnett et A.O. Hume, ont commencé à recevoir des lettres d'un mystérieux personnage, le Maître Koot Hoomi, exposant les principes d'une sagesse orientale secrète censée être transmise depuis le passé immémorial. Des livres apparurent rapidement, d'abord sous la plume de Sinnett - The Occult World and Esoteric Buddhism - puis d'autres, tous transmettant le même ensemble d'enseignements occultes et contribuant à alimenter la croissance de la société théosophique, tandis que Blavatsky elle-même travaillait sur son deuxième grand livre, "la doctrine secrète", un compte-rendu étendu de l'ensemble des enseignements qui prétendaient être un commentaire des stances de Dzyan, un texte fantasmagorique - l'expression, comme nous le verrons, est tout à fait appropriée - aussi vieux que le monde.  Entre-temps, les visiteurs de la maison des Blavatsky à Chennai sont revenus avec des rapports impressionnants sur les phénomènes psychiques étonnants dont ils avaient été témoins, et ces rapports ont trouvé des lecteurs enthousiastes dans les journaux de l'époque.

Une enquête ultérieure de la Société pour la Recherche Psychique (SPR) a révélé de nombreuses preuves que Koot Hoomi, les lettres, les enseignements et les phénomènes psychiques étaient tous fabriqués par Blavatsky, et les sceptiques de l'époque se sont régalés des résultats. Rien de cela ne ralentit la croissance de la Société Théosophique, et il y a de bonnes raisons à cela.  Blavatsky savait exactement ce qu'elle faisait ; elle comprenait bien mieux que les sceptiques qu'un grand nombre de personnes à l'époque victorienne en avaient assez du choix manichéen et  fermé entre le christianisme dogmatique et le matérialisme scientifique tout aussi dogmatique qui leur était présenté par les autorités reconnues de leur culture ; ils voulaient une troisième option qui leur offrait l'espoir d'une expérience personnelle directe des réalités spirituelles, et si cette troisième option dérangeait les défenseurs du statu quo,  c'était tant mieux.  À l'époque et dans les lieux où c'est le cas - et bien sûr nous vivons dans un tel cas aujourd'hui - les divagations des sceptiques autoproclamés attirent simplement plus de gens à la cause qu'ils dénoncent.

C'est là le deuxième facteur qui a empêché la disparition de la société théosophique.  Plus que toute autre chose, le désir d'une troisième option spirituelle moins étroitement liée au statu quo a été la raison pour laquelle la théosophie a explosé en importance dans les années 1880, surtout mais pas seulement aux États-Unis. Ici, en Amérique, des loges ont vu le jour dans toutes les villes, quelle que soit leur taille, et dans certaines villes assez modestes ; à partir de là, des conférences publiques et des livres bon marché ont permis de répandre largement le nouvel évangile et les concepts que Blavatsky a empruntés aux traditions spirituelles de l'Inde - la réincarnation, le karma, les cycles cosmiques dans lesquels les mondes naissent et meurent, et bien plus encore - sont devenus partie intégrante du langage courant de l'avant-garde culturelle dans la plupart des pays occidentaux.

 

Ignatius Donnelly

Ignatius Donnelly

Blavatsky a fourni toutes ces choses à ses disciples, et bien plus encore. C'est, en moitié, grâce à elle que vous avez entendu parler d'un endroit appelé Atlantide. (L'autre moitié est celle d'un remarquable  américain excentrique nommé Ignatius Donnelly, l'un des fondateurs de la culture alternative moderne, dont le livre Atlantis : The Antediluvian World, publié en 1882, a fait irruption dans la culture populaire au moment même où la théosophie prenait son essor).  C'est grâce à Blavatsky, plus précisément, que vous avez entendu parler de l'Atlantide comme d'une civilisation préhistorique dotée de technologies avancées qui s'est détruite elle-même lorsque ses maîtres se sont tournés vers le mal. Ce n'est ni dans Platon ni dans Donnelly ; Blavatsky en est l'auteur et s'inscrit dans une vaste histoire alternative dans laquelle l'Atlantide n'était qu'un des continents perdus et notre âge actuel est le cinquième des sept âges du cycle cosmique actuel.

Gerald Gardner

Gerald Gardner

Une façon de penser à la remarquable diffusion des idées théosophiques est de dire que la théosophie était l'équivalent de la Wicca au siècle précédent.

D'une certaine manière, les parallèles sont assez exacts.  Les deux mouvements avaient des origines nettement douteuses - les maîtres et leurs enseignements séculaires se sont avérés tout aussi difficiles à documenter à la lumière de recherches sérieuses que le culte des sorcières païennes du Moyen Âge sur lequel Wicca a fondé ses revendications historiques.  

Les deux mouvements ont pris cette forme en raison de l'impact d'une personnalité colorée - Gerald Gardner dans le cas de Wicca, H.P. Blavatsky dans le cas de la Théosophie - qui a rassemblé les travaux de nombreux écrivains et penseurs précédents en une unité viable, et l'a parée d'un apparat coloré bien adapté à la culture populaire de leur époque.

 Dans les deux cas, le récit officiellement approuvé de l'histoire et de la préhistoire humaines a été remplacé par une vision alternative radicalement différente du passé.  

Les deux mouvements ont répondu à des besoins culturels importants que les options spirituelles et séculières établies de leurs temps respectifs n'ont pas réussi à satisfaire, et les deux mouvements se sont transformés en véhicules qui pouvaient être utilisés, et ont été utilisés, par des femmes fortes et talentueuses pour se frayer un chemin dans les réserves de spiritualité alternative, essentiellement masculines, en Amérique.

La comparaison entre les deux mouvements ne peut toutefois être poussée plus loin. En particulier, la décision de Gerald Gardner d'utiliser la figure de la sorcière comme pièce maîtresse de sa "nouvelle" Ancienne Religion s'est avérée avoir des conséquences très limitantes.  Dans le folklore et l'histoire européens, la sorcière est une figure marginale, pauvre, isolée, méprisée et vulnérable. La Wicca a donc inévitablement attiré un grand nombre de personnes qui s'imaginaient un statut tout aussi marginal dans les sociétés occidentales contemporaines, et l'ont généralement obtenu.  C'est la raison principale pour laquelle si peu d'organisations Wicca ont pu financer et entretenir les espaces de rencontre et autres propriétés que la plupart des mouvements spirituels américains - y compris ceux fondés et dirigés par des personnes très pauvres - ont pu se les procurer selon l'ordre des choses.

La Wicca n'a rien d'équivalent

La Wicca n'a rien d'équivalent

La théosophie n'avait pas une image aussi problématique pour travailler,  ne souffrant pas de la même contrainte auto-infligée, elle a donc réussi  facilement les tâches auxquelles la plupart des groupes Wiccan ont échoué.  

Le mouvement de Blavatsky, en particulier, n'était pas particulièrement attrayant pour les marginaux.

En fait, les théosophes trouvèrent de nombreuses recrues parmi les personnes financièrement et socialement prospères, et n'eurent donc aucun mal à créer et à financer un réseau d'organisations locales avec leurs propres salles de réunion, bibliothèques, librairies, centres de retraite et autres équipements, dont beaucoup existent encore aujourd'hui.  Le succès de ces tâches organisationnelles de base a donc donné à la théosophie un impact sur la culture populaire de son temps bien plus grand que celui que la Wicca a eu ou aura jamais.

Parce que la Société Théosophique rejetait formellement l'idée d'exiger de ses membres qu'ils souscrivent à un ensemble de dogmes, elle attirait en outre des membres et des sympathisants d'un éventail extrêmement large de personnes ayant des intérêts alternatifs dans la culture occidentale de la fin du XIXe siècle.  Au cours de ce que nous pourrions tout aussi bien appeler le siècle théosophique, de 1880 à 1980, si vous vous intéressiez à une forme quelconque d'occultisme ou de spiritualité alternative, il y avait de fortes chances que vous fassiez vos achats dans une librairie théosophique, que vous suiviez des conférences ou pratiquiez le yoga dans une loge théosophique, que vous étudiiez des livres d'auteurs théosophiques ou que vous soyez influencé d'une manière ou d'une autre par la grande création de Blavatsky.

L. Frank Baum

L. Frank Baum

Tout cela a contribué à la phase la plus remarquable de la carrière de la Théosophie, que nous pouvons mieux suivre grâce à l'exemple d'un jeune homme du nord de l'État de New York nommé Lyman Frank Baum. Né en 1856, Baum était fou de théâtre dès son plus jeune âge - ce qui n'est pas rare à une époque où le théâtre en direct était de loin le divertissement le plus coloré qui soit - mais ses talents d'acteur et de dramaturge n'étaient pas assez importants pour payer les factures, et il s'est plutôt retrouvé dans le commerce de détail et le journalisme. Son premier véritable succès est venu d'un magazine, The Show Window, qui vendait du commerce de détail et proposait des idées pour les vitrines des magasins et la réclame visuelle. Son habitude de raconter des histoires vivantes à ses enfants lui a inspiré ses deux entreprises suivantes, une paire de livres de contes style Mère l'Oie pour les enfants.  Ceux-ci se sont bien vendus et l'ont amené à envisager quelque chose de plus ambitieux, une histoire fantastique pour enfants se déroulant dans un royaume imaginaire appelé Oz.

Matilda Joslyn Gage

Matilda Joslyn Gage

Mais cette histoire de fantaisie est plus que le fruit d'une imagination débordante.  Baum était théosophe ; sa femme était la fille de Matilda Joslyn Gage, une grande féministe et une radicale politique de l'époque, qui avait trouvé le chemin de la théosophie. C'était une voie bien tracée à l'époque, car le mouvement féministe lancé avec une telle démonstration d'unité lors de la convention de Seneca Falls en 1848 s'était scindé en deux factions querelleuses à la fin du siècle.  La plus grande faction soutenait les idées morales victoriennes et insistait sur le fait que le féminisme était inséparable du christianisme protestant et de la prohibition de l'alcool, tandis qu'une plus petite faction rejetait le consensus moral victorien et défendait quelque chose de beaucoup plus proche de ce que le féminisme est devenu après les années 1960.

Dans les dernières années du XIXe siècle, il était clair que l'aile chrétienne conservatrice du féminisme était en pleine ascension, et de nombreuses femmes de l'autre faction se sont donc retrouvées mal accueillies dans les cercles féministes.  Un grand nombre d'entre elles se sont retrouvées dans la société théosophique, et Matilda Joslyn Gage en faisait partie. Elle est une figure importante de notre histoire pour plus d'une raison ; elle a joué un rôle central dans la redéfinition de la sorcellerie médiévale en tant que culte proto-féministe d'adoration des déesses, éradiqué par les inquisiteurs maléfiques, et son livre de 1893, Woman, Church, and State, une contre-expertise contre l'aile chrétienne conservatrice du mouvement féministe, a été la première source en langue anglaise pour l'affirmation, tout à fait inexacte, que neuf millions de sorcières avaient été brûlées lors des persécutions de sorcellerie de la fin du Moyen Âge.

Le pentacle des éléments

Le pentacle des éléments

Cela sera pertinent pour notre histoire plus tard.  Le plus important pour la présente histoire est que sa fille et son gendre l'ont suivie en Théosophie et l'ont trouvée intéressante. Baum, en particulier, semble avoir fait une étude très approfondie de la philosophie occulte. Si vous vous demandez, en d'autres termes, pourquoi les personnages du Magicien d'Oz s'organisent selon les quatre éléments magiques : l'Épouvantail, qui veut un cerveau, à l'Air ; le Bûcheron de Fer, qui veut un coeur, à l'Eau ; le Lion Lâche, qui veut du courage, au Feu ; Dorothy, qui veut juste rentrer chez elle au Kansas, sur Terre ; et Toto le chien, dont le nom signifie littéralement "du tout" en latin, et qui révèle le petit homme derrière le fantasme d'Oz le Grand et le Puissant, à l'Esprit - vous savez maintenant pourquoi.

L'impact de tout cela sur l'imagination américaine a été considérable.  Le Magicien d'Oz a été le livre pour enfants le plus vendu en Amérique pendant deux années complètes après sa publication et est devenu l'un des grands romans pour enfants de l'histoire américaine.  Baum a ensuite écrit treize autres livres sur Oz, dont certains étaient tout aussi chargés de symbolisme occulte que le premier, et une foule d'autres romans pour enfants, dont la plupart sont aujourd'hui oubliés à tort.

Matériaux bruts pour l'imagination

Matériaux bruts pour l'imagination

L'une d'entre elles a peut-être eu un impact indirect énorme, bien que non reconnu, sur la culture américaine plus tard. Il s'agit de The Life and Adventures of Santa Claus, que Baum a publié en 1902 et qui est devenu un autre best-seller pour enfants à son époque, en Grande-Bretagne comme en Amérique. Parmi ses caractéristiques intéressantes, il met en avant les relations entre les mortels et les immortels - le bébé Claus, un humain, est trouvé et entretenu par la nymphe des bois immortelle Necile, juste pour commencer - et dans ce livre, les trois plus grands immortels, le Maître bûcheron du monde, le Maître cultivateur du monde et le Maître marin du monde, ont des rôles importants.

C'est une histoire captivante, et si vous étiez un garçon solitaire et studieux, avec une vie imaginaire animée, à l'époque où c'était un best-seller, il est tout à fait concevable que cela ait pu déclencher toute une cascade de rêveries, et éventuellement d'histoires, dans lesquelles l'interaction entre les mortels et les immortels était un thème constant et où un Maître Marin du Monde était un personnage central dans les premières versions du légendaire qui en résultait.  Et bien sûr, si votre nom se trouve être J.R.R. Tolkien, et que vous remplissez une célèbre trilogie avec vos réflexions mûres sur ces mêmes thèmes, ces idées finiront par éclabousser l'imagination américaine une fois que votre trilogie sera devenue la lecture standard dans toute l'avant-garde culturelle du monde occidental.

J.R.R. Tolkien

J.R.R. Tolkien

Non, je ne sais pas avec certitude si Tolkien a été influencé par La vie et les aventures du Père Noël, mais lorsque j'ai lu le livre pour la première fois il y a quelques années, j'ai été frappé par le nombre de thèmes clés des premières phases de la grande légende de Tolkien qui se trouvent dans ses pages. Tolkien a certainement été fortement influencé par les livres qu'il a lus dans sa jeunesse - par exemple, la scène dans La Communauté de l'Anneau où Frodon est emprisonné par la fourgonnette est influencée, presque jusqu'au plagiat inconscient, par une scène comparable dans la fantaisie de Walter de la Mare de 1910, The Three Mulla-Mulgars - et nous savons, grâce au travail de son fils Christopher, que les thèmes que j'ai décrits ont été des influences majeures depuis les premières esquisses que Tolkien a écrites jusqu'à ses derniers écrits sur la Terre du Milieu.

Ce qui me fascine particulièrement, c'est que Tolkien, catholique romain fervent qu'il a été plus tard dans sa vie, a été profondément influencé par l'histoire alternative théosophique. D'une ligne de temps divisée en âges numérotés - le troisième âge de la Terre du Milieu s'inscrirait assez confortablement dans les cycles historiques décrits par Blavatsky - à une histoire atlantiste qui est blavatskienne de bout en bout, dominée par le conflit entre une majorité qui adorait le pouvoir du mal et une minorité qui a fui le continent condamné au dernier moment, la Terre du Milieu est une création du siècle théosophique. "Je suis un serviteur du Feu secret", dit Gandalf au pont de Khazad-dûm ; ce terme n'est défini nulle part dans les documents de Tolkien, mais tout théosophe ayant bien lu sait ce qu'il signifie. Il semble probable que durant ses jeunes années, avant que l'âge moyen n'apporte son conservatisme traditionnel, Tolkien ait nourri son imagination avec des bribes de littérature théosophique.

Robert E. Howard

Robert E. Howard

Il était loin d'être le seul auteur de fantasy iconique de l'époque à le faire. Robert E. Howard, créateur de Conan le Cimmérien et d'une foule d'autres héros musclés et aventureux, s'est largement inspiré de l'un des volumes d'histoire alternative théosophiques classiques - The Story of Atlantis and the Lost Lemuria de William Scott-Elliot - pour créer son propre passé alternatif, avec la collection habituelle de continents noyés, de sinistres enchanteurs et de machineries évolutionnaires. L'ami et infatigable correspondant d'Howard, H.P. Lovecraft, connaissait encore mieux la théosophie que Howard, et l'a systématiquement exploitée pour trouver des thèmes sur lesquels il pouvait placer sa propre tournure inimitable : "Les théosophes ont deviné l'impressionnante grandeur du cycle cosmique dans lequel notre monde et la race humaine forment des incidents transitoires", écrivait-il dans "L'appel de Cthulhu".  De Talbot Mundy et A. Merritt à une galaxie oubliée d'auteurs moins doués, la fiction fantastique du XXe siècle était inondée d'idées théosophiques ; dans un sens très réel, c'est ce qui distingue la fantaisie de cette époque de ses épigones moins impressionnants d'aujourd'hui.

Ce n'est là qu'un aspect, bien qu'important, de la pénétration des idées théosophiques dans la culture populaire américaine au cours des trois premiers quarts environ du XXe siècle.  Si vous vous y connaissez en théosophie, vous serez surpris de constater que la culture alternative américaine de cette époque était très peu développée.  De ce processus sont nées certaines des créations les plus impressionnantes de l'âge d'or de l'occultisme américain, certaines des plus stupides, et d'autres qui ont réussi à combiner le brillant et l'absurde dans une égale mesure. Au cours des mois à venir, nous allons en parler, en commençant par les mouvements occultes qui se sont confronté à la Société théosophique à ses débuts, et en terminant par ceux qui étaient là pour ramasser les morceaux lorsque la Société théosophique s'est effondrée et a brûlé dans l'une des grandes catastrophes auto-infligées de l'histoire de l'occultisme.

 

Merci à DeepL et à sombre vertpour la traduction

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